Santé numérique en Afrique: un effet de mode sur un socle de vulnérabilité ?

[Tribune] Au début de la pandémie du covid-19, tous les projecteurs se tournaient vers l’Afrique, qualifiée comme le continent le plus menacé, vulnérable et l’épicentre des maladies transmissibles.

Malgré sa forte capacité de résilience, le continent doit encore se développer, identifier ses points de faiblesse et se moderniser. C’est tout le pari de la santé connectée, une tendance qui suscite de grands espoirs…sans constituer pour autant la solution radicale aux problèmes de la santé en Afrique…

E-santé, ou santé électronique, a été définie en 2000, par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), comme un ensemble des moyens et services liés à la santé, utilisant les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) à la santé. Elle fait appel à l’internet, aux applications pour smartphones et aux objets connectés.

 

Malgré de moult réformes, la plupart des systèmes de santé africains souffrent encore d’importants déficits financiers, techniques et humains. Un rapport de l’OMS sur l’état de santé dans la Région africaine, avait démontré que l’indice moyen de performance du système dans la Région s’élève à 0.49%, ce qui signifie que les systèmes sont à la moitié (49%) seulement de leurs niveaux de fonctionnalités possibles, ce qui implique que l’Afrique est encore loin de la performance dans « l’industrie de la vie ».

Devant la maladie et la difficulté d’accès aux soins, les gens cherchent la solution quel que soit le prix à payer – la santé n’a pas de prix-. Chaque année, beaucoup d’africains aisés optent pour des soins à l’étranger, alors que d’autres cherchent à court-circuiter la longue file d’attente dans le secteur public, où un rendez-vous pour un scanner ou une imagerie par résonnance magnétique peut prendre des années. En Afrique, le déséquilibre entre population et offre de soins est toujours flagrant, la médecine traditionnelle prend encore le dessus sur la médecine moderne. Le développement des soins de santé bute encore sur plusieurs obstacles, tels que, l’analphabétisme, la fuite des médecins à l’étranger, la pauvreté, le manque de couverture médicale, la problématique des faux médicaments …et les exemples foisonnent pour nous démontrer que la médecine 2.0 ou la médecine digitalisée, informatisée a encore du chemin à parcourir, pour trouver sa place dans le continent qui enregistre le plus faible taux de connectivité au monde selon le rapport de la Banque Mondiale.

Les freins potentiels à la généralisation de la médecine connectée ne sont pas seulement liés à aux freins technologiques stricto sensu mais plutôt aux limites liées à l’usage, à la perception et aux problèmes de financement. Technologiquement, l’intégration de la télémédecine et la TIC en santé en Afrique, n’est pas impossible, le journal médical The Lancet a qualifié l’Afrique subsaharienne de nouveau terreau fertile pour la santé numérique mondiale. Le numérique est un facteur clé, et l’un des moyens les plus efficaces pour appuyer la réforme du système de santé et accompagner la mise en place de la Couverture sanitaire universelle (CSU) et une solution aux contraintes budgétaires et à la pénurie en ressources humaines qualifiées.

La réussite d’une telle métamorphose est tributaire de trois conditions : une volonté politique, une performance technologique, et bien sur un modèle économique qui assure la viabilité dans le temps (investissement initial et maintien économique dans le temps).  La E-santé ne peut être la médecine de demain en Afrique, elle peut néanmoins aider ce secteur à surmonter certains problèmes basiques, à travers l’amélioration de la transmission des informations entre les professionnels de santé et entre les médecins et les patients, réduire les déserts médicaux, garantir une économicité et un suivi médical continu de bonne qualité grâce au partage du dossier médical, et la promotion de la prévention médicale.

Dr GHANIMI Rajae

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