Le paysage des ressources humaines à l’ère de l’IA : l’Afrique entre opportunités et défis

Une table ronde du Future of Work Forum Africa 2025

La deuxième édition du Future of Work Forum Africa qui s’est tenue les 15 et 16 mai 2025 à Anfa Park, Casablanca, autour de l’Harmonie comme thème central, a permis de dresser un état des lieux des transformations profondes induites par l’intelligence artificielle (IA) sur le paysage des ressources humaines (RH) et l’emploi, tout en ouvrant de nouvelles pistes de réflexion sur l’avenir du travail en Afrique.

L’IA s’impose aujourd’hui comme un levier majeur d’évolution des métiers RH, en Afrique comme ailleurs. Le forum Future of Work 2025 a mis en lumière que l’intégration croissante des technologies d’IA dans les pratiques RH bouleverse la gestion des talents, le recrutement, l’engagement des collaborateurs et la formation. Cette évolution n’est pas seulement technologique ; elle est aussi culturelle et organisationnelle, invitant à repenser les modèles de management, de gouvernance et d’accompagnement des carrières.

Selon le communiqué du forum, « l’IA est un accélérateur de transformation » qui pousse les entreprises africaines à adopter des modèles plus flexibles, collaboratifs et transversaux. L’accent est mis sur la valorisation des compétences humaines, relationnelles et émotionnelles, qui deviennent le complément indispensable à l’automatisation des tâches routinières. Cette mutation permet aux professionnels RH de se recentrer sur des fonctions plus stratégiques, telles que le développement du capital humain, l’écoute active et l’accompagnement personnalisé.

L’impact de l’IA sur l’emploi

Le forum a également abordé l’impact de l’IA sur l’emploi, un sujet qui suscite autant d’espoirs que d’inquiétudes. L’IA, en automatisant certaines tâches, accélère le déclin de métiers traditionnels mais crée aussi de nouveaux emplois, notamment dans les domaines technologiques, l’analyse de données, la cybersécurité, ou encore la formation continue. Selon les analyses partagées lors de l’événement, près de 40 % des compétences nécessaires sur le lieu de travail sont appelées à évoluer d’ici 2030, et 59 % des travailleurs devront se reconvertir ou améliorer leurs compétences pour rester compétitifs.

Les débats ont souligné la nécessité d’anticiper ces mutations par des politiques publiques volontaristes et des stratégies d’inclusion. Comme l’a rappelé M. Younes Sekkouri, ministre marocain de l’Inclusion économique, de l’Emploi, des Compétences et de la TPE, le futur du travail est une ambition qui va au-delà du modèle économique, c’est une ambition qui est au cœur du modèle de société. Nos jeunes ont envie de travailler autrement. Il a insisté sur la nécessité d’adapter la législation, notamment par l’introduction du travail à distance et du temps partiel dans le prochain code du travail.

Nouvelles pistes de réflexion

L’une des grandes avancées du forum réside dans la reconnaissance de l’importance des compétences humaines et de l’inclusion comme moteurs de performance. L’IA, loin de se substituer à l’humain, invite à repenser la complémentarité entre l’homme et la machine. La formation continue, la montée en compétences et l’accompagnement personnalisé deviennent des priorités pour garantir l’employabilité et l’épanouissement professionnel des salariés.

Mme Raissa Malu, ministre d’État de la République Démocratique du Congo, a appelé à « une coopération africaine stratégique, pour co-construire ensemble des outils numériques communs, des standards de compétences partagées, des hubs de formation inter-régionaux, et des observatoires conjoints du futur du travail ». Elle a notamment souligné la nécessité de parler d’une seule voix pour « faire du futur du travail un avenir pensé depuis l’Afrique, pour l’Afrique, avec les Africains ».

Le dialogue intergénérationnel a également été identifié comme un levier stratégique sous-exploité. Les échanges entre jeunes talents et générations expérimentées sont perçus comme une richesse à activer pour bâtir des organisations résilientes, innovantes et inclusives.

L’IA redessine le monde du travail de demain

Les travaux du Future of Work Forum Africa 2025 ont permis de dégager cinq lignes de force pour le futur du travail en Afrique :

  • Un management moins hiérarchique, plus collaboratif et ancré dans le sens
  • L’inclusion comme moteur de performance et de transformation structurelle
  • L’IA comme accélérateur de transformation, nécessitant une reconfiguration des compétences
  • Le capital humain comme ressource stratégique, à gérer par l’écoute, la formation continue et l’accompagnement personnalisé
  • Le lien intergénérationnel comme atout africain majeur à activer.

L’Afrique, forte de sa jeunesse, de ses traditions de solidarité et de ses talents, a l’opportunité de forger son propre modèle du futur du travail, adapté à ses réalités et à ses ambitions. Comme l’ont souligné les co-fondatrices de Workup Africa, Wassila Kara, Amal L. Alami et Wissal Assemmar, initiatrices du forum : « Au-delà des chiffres, c’est la dynamique collective et l’engagement des participants & participantes qui constituent la principale richesse de cet événement. »

À l’ère de l’IA, le paysage des ressources humaines en Afrique se transforme en profondeur. Si les défis sont nombreux – adaptation des compétences, inclusion, dialogue intergénérationnel – mais les opportunités le sont tout autant. L’Afrique, en s’appuyant sur ses forces et sa capacité d’innovation, est en mesure de redéfinir les contours du travail de demain, pour elle-même et, peut-être, pour le monde.

Anselme AKEKO

Responsable éditorial Cio Mag
Correspondant en Côte d'Ivoire
Journaliste économie numérique
2e Prix du Meilleur Journaliste Fintech
Afrique francophone 2022
AMA Academy Awards.
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