Les acteurs de la transformation digitale en Afrique ont rendez-vous les 19 et 20 mai 2023 à Antananarivo, à Madagascar. La 12è édition des Assises qu’accueille l’île porte sur le thème « Capital humain, catalyseur d’un écosystème numérique africain performant ». En prélude à ce rendez-vous, Jean-Michel Huet, Associé BearingPoint, décrypte pour nous l’enjeu de la formation des ressources humaines. Il est membre du Comité scientifique des ATDA 2023.
CIO Mag : Dans le processus de la transformation numérique, comment le capital humain peut-il permettre à l’Afrique de faire de grands sauts ?
Jean-Michel Huet : Il n’est de richesse que d’hommes, écrivait Jean Bodin il y a 5 siècles. Cette maxime est toujours d’actualité et plus encore dans le numérique. Le numérique ne peut se développer que par et pour les hommes. « Par », car c’est en ayant des Africains compétents dans des domaines proches du numérique que celui-ci pourra se développer. Le champ des possibles est immense et pas seulement dans le codage (même si c’est un sujet, puisqu’ il manque d’ores et déjà 10 millions de codeurs en Afrique), mais aussi en IA, en analyse de données, en service, etc. « Pour », car le numérique peut aider les Africains dans de nombreux métiers, notamment l’agriculture, dans la vie de tous les jours pour avoir un job, pour recevoir des filets sociaux via leur téléphone, etc. « Pour », car le numérique peut accompagner le citoyen dans ses relations avec les administrations, les marchands, les partis politiques.
Et bien sûr, il n’est de richesse que d’hommes et de femmes … car tout cela ne peut se faire sans la moitié de la population.
Des pays comme le Maroc l’ont bien compris en ayant réussi en 10 ans à avoir quasiment autant d’étudiantes que d’étudiants dans les écoles d’ingénieurs ; les programmes de paiements digitaux de la Banque Mondiale visent en priorité l’inclusion financière des femmes.
Les compétences pointues sont souvent rares. Comment le continent peut-il rester attractif pour les profils hautement qualifiés ?
Cela peut se jouer à plusieurs périodes. Tout d’abord, en formant les jeunes talents sur le continent. Le développement des formations (niveau Bac-2 à Bac +5) in situ sur le continent est un moyen de créer un lien avec son alma mater estudiantine. Ensuite, la question est de savoir si ces talents vont rester en Afrique ou tenter d’aller sur des emplois en Europe ou en Amérique. Il s’agit là de la capacité des entreprises (voire des administrations) à proposer des emplois avec une bonne rémunération, un sens, des impacts possibles. Enfin, il y a aussi la voie de retour pour ceux qui sont partis via ce que la diaspora peut apporter, les investissements, les « repats », les start-up.
Comment BearingPoint accompagne-t-il ses clients sur le continent à s’entourer des talents requis pour le développement durable de leurs activités ?
Nous travaillons sur les trois étapes précédentes : accompagner les Etats dans le développement des formations pour les talents digitaux ; aider les entreprises dans leurs organisations, leur formation, leur politique RH et enfin dans l’accompagnement des écosystèmes innovants et entrepreneuriaux.