(CIO Mag) – L’informaticien camerounais Alain Ekambi est le promoteur d’une plateforme de communication qui veut refléter l’indépendance numérique du Cameroun en particulier et de l’Afrique en général. Approché par Cio Mag, il a livré les contours de sa solution adaptée aux réalités africaines.
L’Afrique doit-elle attendre des autres ? A cette question, la réponse est certainement non, pour ce jeune entrepreneur. Derrière ce que plusieurs observateurs décrivent comme le « nouveau WhatsApp africain » récemment mis en place, Alain Ekambi sait clairement ce qu’il veut.
« Nous essayons de créer une plateforme axée sur l’Afrique et offrant des services adaptés au contexte africain. Actuellement le continent compte 500 millions d’internautes. Un nombre croissant duquel ne ressort pourtant aucune participation africaine. Nous utilisons les réseaux sociaux étrangers, nous en sommes dépendants et notre particularité est de vouloir renverser la situation », a-t-il expliqué.
De quoi s’agit-il exactement ? Une application de messagerie et bientôt de transfert d’argent entre ses utilisateurs. Pour y accéder, il faut s’inscrire avec une adresse email et un mot de passe pour recevoir un identifiant. Lequel sert avantageusement de numéro de téléphone pour ceux qui n’ont pas besoin de communiquer leur contact. Ce même identifiant permettra d’effectuer des transferts d’argents d’ici l’année prochaine.
Différent de WhatsApp
« Nous sommes encore au niveau basic de notre projet. Une fois solide, le premier service que nous lancerons en début d’année prochaine sera celui de transfert d’argent facilement entre les membres inscrits et à des prix tres compétitifs », a annoncé Alain.
Lorsqu’on évoque des transactions monétaires, il est naturel dans le contexte d’une messagerie à l’apparence simpliste de se poser des questions de sécurités. « A ce sujet, nous avons des mesures de sécurisation prises et que nous ne pouvons pas communiquer afin qu’elles ne soient pas détournées. Mais déjà il faudrait employer une pièce d’identité et une photo pour avoir accès aux services de transferts », a-t-il laissé savoir.
« En termes de particularités, sur cet espace, la communication est possible sans partage de numéro de téléphone comme le fait WhatsApp par exemple » a-t-il précisé. Pour l’informaticien camerounais, « il ne s’agit pas forcément de se différencier technologiquement des autres, mais d’entreprendre sans attendre que les autres le fassent d’abord ».
Actuellement la plateforme compte environ 11 000 personnes inscrites, soit 10 000 quotidiennement actives. Son promoteur projette d’en faire le premier espace numérique de communication en Afrique. « C’est-à-dire devenir d’ici deux ans un réflexe comme Facebook, Snapchat, etc. Tout Africain devrait pouvoir l’employer, s’y sentir chez soi », a-t-il souligné.
Il faut convaincre
Cependant, faire adhérer les Africains n’est pas une tâche facile pour l’instant à en croire Alain. « Notre plus grand obstacle est de captiver les gens. Beaucoup n’en voient pas encore la nécessité. Ils ne comprennent pas qu’il est capital de créer des solutions adaptées à nos réalités et que nous pouvons gérer nous-mêmes. Le gros problème est de se servir des applications sans se préoccuper de leurs provenances et conditions. Les autres l’ont compris et pas nous en Afrique », regrette-t-il.
« Qu’à cela ne tienne, certains commencent à comprendre notre vision. Il est vrai que nous ne sommes pas encore totalement prêts avec des problèmes de fluidité et des performances. Mais nous y travaillons. L’intérêt est croissant. Nous avons un minimum de 500 000 messages par jours. Nous sommes à environ 20 millions de messages depuis le lancement. Le trafic élevé est encourageant et significatif sur la prise de conscience des gens », se réjouit-il néanmoins.
Concernant le financement du projet, après une première levée de fonds l’année dernière, Alain et ses deux collaborateurs en ont initié une nouvelle cette année, mais ont toujours pris en charge une bonne partie d’investissement.
Pour conclure, il a tenu à souligner l’importance du numérique dans le développement des projets et solutions innovantes comme Dikalo. « Un projet comme celui-là n’aurait pas pu être possible sans le digital. L’Afrique doit embrasser le numérique. Lequel n’est malheureusement pas encore mis au centre de tout sur notre contient comme c’est le cas en occident. Mais avec notre startup nous comptons profiter de la pénétration intense d’internet qui s’annonce tout de même par ici », a-t-il déclaré.
Par ailleurs, l’entrepreneur camerounais aspire à « une meilleure vie pour tous les Camerounais et les Africains. Il espère qu’ils puissent se sentir à l’aise dans leurs pays respectifs. Se déplacer par nécessité vers d’autres horizons mais jamais pour fuir les réalités ». Pour lui, ce continent « doit pouvoir vivre et se suffire de son potentiel. Mais surtout ses populations doivent comprendre que le futur réside dans le numérique ».
Aurore Bonny, Cameroun