
En Côte d’Ivoire, ST Digital, jeune acteur du cloud africain, prévoit d’inaugurer son premier datacenter local au troisième trimestre 2025, dans la zone stratégique de VITIB à Grand-Bassam. Cette infrastructure Tier III marquera une étape importante dans la construction d’un écosystème cloud souverain pour l’Afrique francophone.
(CIO Mag) – Ce datacenter, désormais officialisé après plusieurs mois de développement, illustre une vision qui dépasse l’importation classique de technologies. « Nous concevons une infrastructure adaptée aux réalités de nos marchés, en valorisant nos talents locaux », explique Steve Tchouaga, directeur général de la filiale ivoirienne. Le fondateur, Anthony Same, ambitionne d’étendre ce modèle à d’autres pays comme le Cameroun, le Gabon, le Togo, la Guinée et le Sénégal.
Une infrastructure souveraine face aux défis africains
La demande en capacités cloud, intelligence artificielle (IA) et cybersécurité s’intensifie en Afrique. Le trafic Internet y devrait être multiplié par six d’ici 2030, mais la majorité des données africaines restent hébergées à l’étranger, ce qui soulève des questions majeures de souveraineté et de sécurité numérique.
En 2024, l’Afrique ne représentait que moins de 1% des investissements mondiaux dans les datacenters, très en deçà de l’Amérique du Nord avec 53% de la capacité installée. Selon la Banque mondiale, le continent ne dispose que d’environ 1% des capacités mondiales en datacenters.
Face à ces challenges, ST Digital propose une réponse africaine : un datacenter Tier III conforme aux normes internationales de performance, sécurité et disponibilité. « La souveraineté numérique ne se limite pas à la sécurisation des données. Elle doit garantir une qualité de service égale aux leaders mondiaux », rappelle Stéphane Chapperon, expert chez Grant Thornton. Lors d’un dîner organisé par ST Digital lors de l’Africa CEO Forum, une trentaine de décideurs ont mesuré l’ambition du projet autour du thème « Cloud africain : innovation, souveraineté et compétitivité ».
Un modèle de cloud adapté à l’Afrique
L’objectif est double : réduire la dépendance aux géants étrangers comme Amazon Web Services, Microsoft Azure ou Google Cloud, et rassurer les acteurs locaux sur la souveraineté des données sensibles. Il s’agit aussi de bâtir des modèles économiques adaptés et de développer des compétences.
« Nous ne voulons pas copier les leaders mondiaux, mais créer une infrastructure hybride et endogène, adaptée aux besoins des administrations et PME africaines », explique Steve Tchouaga. L’optimisation énergétique et la modularité technique renforcent ce modèle, limitant l’empreinte environnementale et les coûts.
Cette dynamique est soutenue par les institutions. Le ministère de la Transition numérique en Côte d’Ivoire considère que « l’État doit créer les conditions, mais c’est le secteur privé qui doit construire les infrastructures et services », indique Florence Fadika, conseillère ministérielle.
Innovation et engagement écologique
ST Digital mise sur la flexibilité et la proximité pour assurer la viabilité économique. Le datacenter devrait devenir un hub d’innovation locale, accueillant des développeurs en IA, hébergeant des services critiques publics et rivalisant avec Google, Oracle ou Microsoft en Afrique subsaharienne.
Le projet intègre également des solutions durables pour réduire l’empreinte carbone. « La transition énergétique est une priorité, avec des technologies qui allient performance et respect de l’environnement », souligne Steve Tchouaga. Cette approche éco-responsable illustre la volonté de conjuguer souveraineté numérique et responsabilité environnementale pour un impact durable sur le continent.