
Salle serveurs. Photo CIO Mag
Steve Tchouaga, directeur général de ST Digital Côte d’Ivoire, annonce que le datacenter écoresponsable inauguré à Grand-Bassam a été construit en seulement huit mois. Selon lui, c’est « un exploit mondial ».
(CIO Mag) – « Nous avons réalisé un exploit mondial – et on n’en parle pas assez – en construisant un datacenter en 8 mois. Je mets au défi quiconque de trouver une entreprise dans le monde qui fasse pareil », a déclaré Steve Tchouaga le jeudi 2 octobre, lors de la cérémonie d’inauguration du datacenter. Cette infrastructure est située dans la zone franche du VITIB (Village des technologies de l’information et de la biotechnologie) à Grand-Bassam, et a été construite par l’opérateur ST Digital.
La fiche technique du datacenter indique qu’il s’agit d’une infrastructure de niveau Tier 3, conforme à la norme TIA 942. Implanté sur une surface de 4000 m², ce datacenter est écoresponsable, car il utilise en partie des matériaux locaux et respecte son environnement.
« On a fait confiance à des entreprises locales »
Selon Steve Tchouaga, ce centre de données offre au marché ivoirien du numérique un cloud 100% africain, en termes d’écosystème, de localisation, de gouvernance, et de gestion locale. Il ajoute que le projet a mobilisé des acteurs locaux « performants et aux standards internationaux ». Parmi eux figurent la société de conseil APL (spécialiste en datacenters), l’entreprise Optim@ (services numériques et énergétiques), le cabinet d’architecture CaDT, le groupe AED (architecture écoresponsable), la société d’hébergement Hodi Côte d’Ivoire, et DTech (aménagement de bureaux). De plus, le fonds d’investissement qui a soutenu financièrement le projet est un fonds africain, a révélé le directeur général.

À propos du montant investi, il déclare que c’est un investissement à multiples échelles. C’est le premier datacenter, un autre ouvrira au Gabon, et d’autres suivront. « Nous n’avons pas encore fait le bilan des investissements, mais on sait qu’un datacenter peut coûter 30 millions de dollars ou moins, selon la gouvernance. Nous, nous ne sommes pas à ces niveaux, car nous avons fait confiance à des entreprises locales. »
« Compléter significativement la souveraineté numérique »
Anthony Same, fondateur et directeur général du Groupe ST Digital, a expliqué que ce datacenter vise à « compléter et renforcer significativement » la souveraineté numérique de la Côte d’Ivoire. Il s’inscrit ainsi dans la vision des autorités. « Il offre au pays un standard international capable d’héberger vos données et applications en toute sécurité, dans le respect strict des réglementations nationales », a-t-il souligné, en présence des autorités locales, préfectorales et communales. Il a rappelé que la sécurité est cruciale dans un contexte de numérisation croissante où les cyberattaques sont fréquentes. « Avoir nos propres infrastructures est devenu une nécessité impérative », a-t-il martelé.

Marché local en pleine croissance
La Côte d’Ivoire compte actuellement une vingtaine de datacenters opérationnels ou en construction. Parmi eux, l’Agence nationale du service universel des Télécommunications/TIC (ANSUT) et l’État gèrent cinq datacenters publics : Société nationale de développement informatique (SNDI), Présidence, VITIB, Éducation nationale, et le Datacenter national en cours de construction. Les autres datacenters appartiennent à des opérateurs privés, notamment MTN Côte d’Ivoire (4), Orange Côte d’Ivoire (3), VIPNET (2), MainOne (1), New Digital Africa (1), RAXIO (1), ST Digital (1), et bientôt Cybastion (1).
Ces centres, situés au cœur des clusters d’innovation, renforcent la résilience des systèmes d’information en limitant les risques de panne et de cyberattaques. Ils soutiennent aussi l’émergence d’entreprises et de services numériques locaux, tout en créant des emplois. Par ailleurs, le développement de l’edge computing, qui consiste à rapprocher le traitement des données de leur source, pourrait accroître encore leur rôle.
Baromètre mondial
Cependant, ces acteurs locaux affrontent la concurrence de géants internationaux. Selon Synergy Research Group, en 2022, deux tiers du chiffre d’affaires mondial des services cloud (estimé à 217 milliards de dollars) étaient détenus par les hyperscalers américains Microsoft Azure, Google Cloud Platform (GCP) et Amazon Web Services (AWS). En mars 2024, le baromètre mondial de Cloudscene confirmait la domination des pays du Nord dans la construction de datacenters. Les États-Unis abritent à eux seuls 5 381 des plus de 8 500 centres de données dans le monde.
En comparaison, l’Afrique possède seulement 2% des datacenters mondiaux, soit environ 200 centres, bien loin des besoins estimés à 700 nouvelles installations en 2021 selon l’Association africaine des datacenters.
Pourtant, les entreprises africaines continueront d’investir dans le cloud. Le rapport d’Oxford Business Group, “Data Centres in Africa” (avril 2024), prévoit une hausse de capacité de 50% d’ici 2026, portée par une économie numérique africaine en forte croissance.
Dans ce contexte, l’inauguration du datacenter ST Digital en Côte d’Ivoire s’inscrit dans la conviction que construire un cloud souverain 100% africain est une nécessité impérative.
