L’Afrique à l’ère de l’IA : vers la réalisation des Objectifs de Développement Durable ?

  • Par CIO MAG
  • 31 octobre 2023
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En septembre 2015, l’ensemble des États membres de l’Organisation des Nations Unies (ONU) s’est rassemblé pour adopter un projet ambitieux intitulé “Programme de développement durable à l’horizon 2030”. Ce programme englobe 17 Objectifs de Développement Durable (ODD) conçus pour catalyser une transformation socio-économique profonde en Afrique.

L’essor de l’ère numérique sur le continent est tout particulièrement au cœur de cette transformation d’ampleur. Ces dernières années, la technologie numérique a été reconnue non seulement comme un outil, mais avant tout comme une force motrice majeure du développement. Elle a joué un rôle déterminant en contribuant à atténuer les disparités sociales et culturelles, en favorisant la préservation environnementale, en stimulant la création d’emplois grâce à l’économie numérique florissante et en combattant de manière résolue des problèmes tels que la pauvreté et la faim. Parmi les avancées technologiques qui transforment profondément notre monde, nous pouvons notamment citer l’intelligence artificielle (IA) qui possède un potentiel exceptionnel pour impulser et promouvoir le progrès.

En tirant pleinement profit de ses capacités, l’IA offre des perspectives prometteuses qui suggèrent qu’elle pourrait apporter une contribution d’1,5 milliard de dollars à la croissance économique de l’Afrique d’ici la fin de cette décennie[1]. Si le numérique est le socle sur lequel une Afrique durable et inclusive prend forme, conformément aux aspirations des ODD de l’Agenda 2030 des Nations Unies, alors l’IA est la clé de voûte qui peut concrétiser ces objectifs.

L’IA à l’aube d’une révolution technologique en Afrique

Parmi les défis les plus pressants du continent, la sécurité alimentaire se distingue comme un pilier crucial de la feuille de route des ODD. Les récents bouleversements sur la scène internationale, notamment le conflit russo-ukrainien et ses répercussions sur l’approvisionnement en blé de l’Afrique, ont mis en exergue la vulnérabilité de la sécurité alimentaire de la région.

L’intelligence artificielle se révèle être une force transformatrice, notamment dans le secteur agricole africain. Les applications d’agriculture numérique utilisant cette technologie montrent un potentiel immense. En effet, elles promettent d’améliorer la productivité, d’optimiser l’utilisation des ressources essentielles comme l’eau et l’énergie, et d’assurer une gestion agricole de précision avec l’aide de capteurs. Face à cette tendance, les start-ups AgriTech foisonnent sur le continent. Prenons l’exemple du géant chinois de la technologie, Huawei. Il a investi dans la vision d’une agriculture intelligente adaptée aux besoins de l’Afrique. Au Maroc, son projet “Smart Irrigation” est édifiant. Combinant l’intelligence artificielle, la 5G, le cloud et le big data, il utilise des capteurs pour collecter en temps réel des données sur l’état du sol, des cultures et de l’air. Cette innovation permet aux agriculteurs de réduire drastiquement le gaspillage d’eau tout en maximisant la productivité de leurs cultures.

Cette révolution technologique ne concerne pas uniquement les grandes exploitations. Les petites fermes, qui dominent l’agriculture africaine et fournissent 70% de la nourriture du continent[2], sont au cœur de cette transition. Elles pourraient grandement bénéficier de l’intégration de l’IA, avec un impact direct sur la sécurité alimentaire de la région.

Si l’agriculture se profile comme un domaine phare pour l’IA, cette technologie s’étend bien au-delà avec une multitude d’applications. À Shanghaï, Colin Hu, Président Enterprise & Cloud de Huawei Northern Africa, est revenu sur ces domaines d’applications: “l’IA est apparue dans différents secteurs économiques, transport, santé, industrie, amenant une plus grande efficacité.” Cette technologie a le potentiel d’impulser la transformation de toutes les industries sur le continent. Ainsi, au cours de ces cinq dernières années, les entreprises et start-ups faisant l’usage de cette technologie se sont multipliées en Afrique. On compte désormais plus de 2 400 entreprises spécialisées dans l’IA, dont 40% ont été fondées au cours des cinq dernières années. Le dynamisme autour de l’IA ne passe pas inaperçu[3]. Les investisseurs, conscients de son potentiel transformatif, se tournent de plus en plus vers l’Afrique. Une récente étude du cabinet de conseil PwC prévoit ainsi que l’IA pourrait contribuer à hauteur de 1,5 milliard de dollars à l’économie africaine d’ici 2030[4].

Pour un développement socio-économique durable de l’IA sur le continent africain

L’intelligence artificielle n’est pas seulement porteuse de transformations industrielles. Elle incarne également une promesse forte pour le développement durable. Face à un continent africain où près de 600 millions d’individus n’ont pas accès à l’électricité[5], l’IA se pose comme une réponse à l’Objectif de Développement Durable n°7 : assurer l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable.

L’Afrique est un continent riche en ressources énergétiques renouvelables. Son potentiel solaire, éolien et hydraulique est considérable et commence à être exploité. Toutefois, la carence d’infrastructures adéquates, notamment dans les zones éloignées, freine un approvisionnement énergétique stable et abordable. Si l’extension d’un réseau électrique national reste une gageure coûteuse, des solutions décentralisées voient le jour pour satisfaire les besoins des communautés rurales.

Les smart-grids sont au cœur de la révolution technologique visant une gestion optimisée des ressources énergétiques. Intégrant des avancées comme l’intelligence artificielle, ces réseaux apportent des solutions aux défis d’intermittence des énergies renouvelables. C’est d’ailleurs ce qu’a démontré Engie avec son initiative au Nigéria. En avril 2022, Engie Energy Access a mis en service son premier mini-réseau solaire à Gbangba, éclairant 1 500 résidents et soutenant tant les ménages que les petites entreprises. Cette avancée s’inscrit dans une vision plus large de l’avenir énergétique, où, comme l’a souligné Philippe Wang, Vice-Président exécutif de Huawei Northern Africa lors de la COP 27, « La 5G, l’intelligence artificielle, l’analyse des données, le calcul cloud etc.. amélioreront les processus industriels pour réduire la consommation d’énergie et diminuer les émissions de carbone ».

Bien que ces réseaux intelligents en soient encore à leurs débuts, ils représentent une avenue prometteuse pour les nations africaines. Les smart-grids pourraient être la clé pour déployer à grande échelle des projets d’énergies renouvelables, répondant ainsi aux exigences des Objectifs de Développement Durable.

L’Afrique, avec son potentiel démographique, ses ressources naturelles et sa jeunesse, est sur le point d’entrer dans une ère nouvelle, où l’intelligence artificielle pourrait jouer un rôle central dans la réalisation de ses aspirations de développement durable. Cependant, comme toute technologie émergente, l’IA apporte son lot de défis : la nécessité d’administrer des volumes de données conséquents, d’assurer la souveraineté numérique, et de garantir une adoption éthique et responsable. Pourtant, avec une approche collaborative, intégrée et centrée sur l’humain, l’Afrique peut non seulement naviguer à travers ces défis, mais aussi poser les bases d’un avenir où la technologie et le développement durable avancent main dans la main. L’IA en Afrique n’est pas seulement une opportunité; il s’agit bel et bien d’une révolution en devenir, prête à façonner le destin du continent au XXIe siècle.


[1] Avancée de l’Intelligence artificielle dans les pays africains, African Manager, 2023

[2] Sécurité alimentaire : les États africains s’engagent à investir plus dans l’agriculture, Le Monde, 2023

[3] Avancée de l’Intelligence artificielle dans les pays africains, African Manager, 2023.

[4] Avancée de l’Intelligence artificielle dans les pays africains, African Manager, 2023.

[5] Le nombre d’Africains n’ayant pas accès à l’électricité a augmenté en 2020 et en 2021, Le Point, 2022

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