« YouTube devrait permettre aux agriculteurs de fournir du contenu et non d’en consommer seulement »
Depuis août 2016, Moumini Kowe travaille à développer la présence du Groupe CORIS sur le digital, avec les pôles banque (Coris Bank International Burkina-Bénin-Côte d’Ivoire-Mali-Sénégal-Togo), le pôle assurance (Coris Assurances), le pôle bourse (Coris Bourse) et également la présence sur les réseaux sociaux du Président Directeur Général du Groupe, M. Idrissa NASSA. Moumini Kowe a obtenu plusieurs certifications dont celles de Digital Active de Google, le Marketing Facebook de Facebook Blueprint, le Mooc Culture Digitale, le Mooc Digital et Assurances et le Marketing des réseaux sociaux d’Afnet.biz. Entretien.
CIO Mag : Quels sont les enjeux numériques dans l’agriculture africaine aujourd’hui ?
Moumini Kowe : Le numérique est un enjeu important en Afrique et dans tous les domaines. A priori, le domaine de l’agriculture ne rime pas avec le digital ou le numérique. C’est une vision simpliste. Une analyse plus approfondie révèle des enjeux importants du numérique pour l’agriculture en Afrique. L’introduction du numérique dans l’agriculture a commencé vers les années 1980 avec la montée en puissance de l’ordinateur. Depuis lors, le digital s’installe progressivement pour aider le paysan africain dans sa tâche au quotidien. Aujourd’hui les enjeux de la transformation digitale dans l’agriculture se situent d’abord au niveau du matériel et des engins agricoles, ensuite au niveau de la masse d’informations à capitaliser dans le domaine et enfin au niveau même des filières agricoles.
Au niveau du matériel et des engins utilisés dans l’agriculture, l’enjeu du digital est l’amélioration de ces engins qui nécessitent de moins en moins de ressources humaines et l’objectif à termes est de permettre à ces engins d’être de plus en plus autonomes. Les évolutions des fonctionnalités des tracteurs permettent aux paysans africains de gagner en efficacité. Avec le boom de la téléphonie mobile et l’accessibilité des smartphones, la consultation des informations et des données se fait en toute mobilité. L’agriculture est l’une des principales activités grâce à laquelle des familles vivent sur le continent africain. Or la démographie est galopante en Afrique et les ressources de plus en plus rares. La maîtrise de la masse d’informations agricoles constitue également un enjeu important pour l’agriculture africaine aujourd’hui.
« Le Big data permet aux agriculteurs africains (…) de prédire l’année agricole suivante. »
C’est ainsi qu’on parle du Big data dans le domaine de l’agriculture en Afrique. La recherche, la maîtrise et l’analyse de cette masse d’informations amène des Africains à créer des solutions pour améliorer et développer l’agriculture. Nous avons aujourd’hui en Afrique des startups qui s’investissent dans des innovations agricoles, surtout en Afrique Australe. Le Big data permet aux agriculteurs africains d’analyser, de maîtriser et de mieux exploiter les données agricoles et même de prédire l’année agricole suivante. Enfin, la recherche d’optimisation dans l’agriculture a amené les paysans à s’orienter vers de nouvelles filières plus productives et plus rentables. Aujourd’hui, l’image de l’agriculteur africain avec ses outils rudimentaires est dépassée, ce sont des agriculteurs qui évoluent vers de nouvelles filières agricoles avec plus de rendement, et cela en grande partie grâce à l’évolution de la technologie et de la recherche dans ce domaine.
Que pouvez-vous nous dire sur les enjeux autour du Big data, des données et le Cloud ?
Le secteur de l’agriculture demeure la principale source de revenus dans la plupart des pays africains. Aujourd’hui la démographie est galopante sur le continent africain et nos Etats font face à la rareté des ressources. Le défi, c’est de réussir à passer de l’agriculture traditionnelle de type paysan à une agriculture moderne de type industrialisé. Dans le domaine de l’agriculture, il y a déjà un travail formidable mené par des techniciens, des ingénieurs et des statisticiens qui disposent d’une manne importante d’informations. Le Big data associé aux nouvelles technologies de l’information et de la communication, l’Internet et le mobile vont révolutionner l’agriculture en Afrique si tous les acteurs arrivent à conjuguer leurs efforts ensemble et mettent les résultats de leurs recherches au profit du développement de l’agriculture. Car le propre du Big data, c’est la diversité des sources et la masse importante de de l’information.
« YouTube devrait permettre aux agriculteurs de fournir du contenu et non d’en consommer seulement»
Quel rôle jouent les réseaux sociaux pour les agriculteurs africains ?
Les réseaux sociaux ont pris une place prépondérante dans le quotidien des Africains. Malheureusement, ces médias sont quasiment effacés dans le domaine de l’agriculture. Le rôle premier d’un réseau social est la mise à disposition de l’information. Certains agriculteurs africains utilisent les réseaux sociaux pour la recherche de l’information, le marketing, la vente et la promotion de leurs produits. Les principales utilisations de ces technologies se résument donc à la présentation des produits, souvent de la vente en ligne et la recherche des partenaires. A l’image de l’utilisation des réseaux sociaux en Afrique, le domaine de l’agriculture ne profite pas encore largement des potentialités qu’offrent ces médias. Un média comme YouTube devrait permettre aux agriculteurs de fournir du contenu et non d’en consommer seulement comme ce que l’on constate aujourd’hui.
Comment les nouvelles technologies du numérique peuvent être utiles au travail des agriculteurs ?
L’un des rôles du digital dans l’agriculture est la diffusion de l’information donc de la connaissance. Les nouvelles technologies du numérique doivent permettre aux agriculteurs africains de s’informer sur l’évolution de leur métier, de transmettre des connaissances, de tisser des relations et de trouver des partenaires. Ces technologies sont aussi utiles aux agriculteurs africains lorsqu’elles sont utilisées pour faire du lobbying auprès des gouvernements et partenaires au développement. L’autre pan de ces technologies qui est très utile au travail des agriculteurs africains, c’est le mobile qui devrait faciliter l’information sur les produits agricoles et aider le paysan à mieux gérer sa campagne agricole avec des applications développées aujourd’hui par des startups.
J’apprécie énormément la mise en place par des Africains du web télévision AgriBusinessTV, qui dans son programme en ligne présente des solutions, des modèles de réussite dans le domaine de l’agriculture. Le digital de manière générale ne peut être utile au travail des agriculteurs que si ces technologies sont intégrées dans une approche stratégique. Les Etats africains doivent accompagner les agriculteurs avec une politique de développement de l’agriculture à travers le digital. Cette politique devrait rassembler des axes stratégiques sur l’innovation au service de l’agriculture.
Est-ce que il est possible pour les agriculteurs africains de se connecter entre eux à travers des plateformes web ?
Les agriculteurs africains ont déjà commencé à se connecter entre eux à travers des réseaux communautaires. Il y a la mise en place des coopératives qui utilisent de plus en plus d’outils connectés pour interagir avec les membres ou des partenaires. On peut citer l’exemple de la Fédération des Agriculteurs de l’Afrique de l’Est qui a mis en place une plateforme web afin de faciliter l’interaction entre les producteurs et les acheteurs. Il faut noter aussi le développement par des startups ou des passionnés du web des solutions qui permettent aux agriculteurs de se connecter entre eux pour le partage des informations et expériences ou encore la recherche de partenaires et de financement.
Propos recueillis par Youcef MAALLEMI
Biographie de Moumini Kowe
Diplômé en Sciences et Techniques de l’Information et de la Communication de l’Université de Ouagadougou. Actif dans l’environnement de la communication et du marketing depuis une quinzaine d’années, Moumini a contribué à la mise en place et à l’animation du service de rédaction de la radio Nostalgie Ouagadougou de 2004 à 2008. Cette expérience s’est poursuivie jusqu’en 2016 au sein de la téléphonie mobile Airtel Burkina Faso, où il a acquis pendant cette collaboration une solide expérience dans le marketing de la téléphonie mobile, le sponsoring, les relations publiques, le service clientèle, la gestion stratégique des medias et du digital. Il a contribué à faire d’Airtel Burkina Faso la compagnie de téléphonie mobile la plus active sur les réseaux sociaux au Burkina Faso. Agriculteur du Web, il sème les graines (stratégies), il travaille la terre (publication et animation) pour récolter les fruits de son travail (engagement de la communauté, réalisation d’objectifs et des indicateurs de performance). Depuis août 2016, Moumini travaille à développer la présence du Groupe CORIS sur le digital, avec les pôles banque (Coris Bank International Burkina-Bénin-Côte d’Ivoire-Mali-Sénégal-Togo), le pôle assurance (Coris Assurances), le pôle bourse (Coris Bourse) et également la présence sur les réseaux sociaux du Président Directeur Général du Groupe Monsieur Idrissa NASSA. Moumini a obtenu plusieurs certifications dont celles de Digital Active de Google, le Marketing Facebook de Facebook Blueprint, le Mooc Culture Digitale, le Mooc Digital et Assurances et le Marketing des réseaux sociaux d’Afnet.biz.
Youcef MAALEMI