(Cio Mag) – La non digitalisation des entreprises fait perdre plus de 825 milliards de FCFA annuellement au Cameroun et met en péril plus de 16 000 emplois, selon le Groupement inter-patronal national (Gicam). Comment comprendre et éviter cela ? Jean Pierre Boep, expert camerounais en marketing digital et entrepreneur propose une approche globale intégrant les entreprises et les ressources dont elles disposent.
Cette information relayée par les médias locaux dernièrement, montre la nécessité de numériser les services des entreprises. En détails, les pertes sont de 785 milliards de fcfa, avec des pertes d’équipement de plus de 40 milliards de FCFA soit une moitié en agro-industrie. Tandis que sur l’impôt sur les sociétés, les redevances et les diverses taxes, le compte est de 18,5 milliards de FCFA.
Entre indisponibilité des données, des statistiques, des rapports d’activités et des résultats de fin d’exercice, la distance est claire pour les entreprises et l’option numérique.
Selon certains experts nationaux dans le domaine, il n’est pas possible de réussir un projet de transformation digitale dans une entreprise si le personnel ou les dirigeants de cette entreprise ne sont pas impliqués, ne maîtrisent pas les enjeux et n’ont pas une projection digitale pour leur société.
De son coté, Jean Pierre Boep pense à la nécessité d’un certain nombre de prérequis qui ne relèvent pas uniquement de la capacité des entreprises. Pour lui, elles sont bien conscientes du besoin et des enjeux d’une numérisation. « Au Cameroun, il faut qu’on arrête de penser la transformation digitale comme un ‘must’ vers lequel il faut aller demain. C’est un processus qui fait son bout de chemin depuis une dizaine d’années. Les entreprises comprennent la nécessité de l’intégrer. Mais il est question de moyens et de décisions stratégiques à prendre. Ce qui n’est pas toujours évident dans notre contexte », a-t-il affirmé. Le retard ou l’absence de digitalisation des entreprises n’est pas à imputer à ces entreprises selon lui.
Constatant qu’il n’y a pour l’instant pas « véritablement de ligne coordonnées », à cet effet, il est convaincu qu’il faudrait une stratégie collective nationale de transformation numérique.
Ce qu’il faut !
« Si on a encore dans notre pays des appréhensions au sommet de l’Etat par rapport à cela, on ne peut pas vraiment en vouloir aux entreprises de ne pas être prêtes et de ne pas se donner des moyens d’aller globalement vers une transformation », a expliqué le consultant.
La stratégie qu’il prône, devra intégrer toutes les problématiques liées aux entreprises, aux institutions et aux Hommes. Elle devra aussi prendre en compte un certain nombre de secteurs.
Cependant, reconnaissant que cela ne sera pas réalisable en un claquement de doigts, il pense qu’il faudra « une volonté manifeste » et affichée et pas une « volonté de façade » à accompagner les entreprises dans ce processus.
Sinon, d’après lui, il faudra redouter la souffrance de ces entreprises, le chômage des salariés et un Etat déficitaire face aux enjeux de cette digitalisation.
« Je pense que le GICAM fait bien de soulever ce point parce qu’à elle seule, la crise du Coronavirus est venue montrer à quel point on n’est pas préparé au numérique. Mais aussi et à quel niveau notre défaillance généralisée dans l’intégration du numérique dans nos processus d’entreprise constitue une vraie faille lorsqu’il y’a une crise », a ajouté l’entrepreneur camerounais.
A ce propos, il a remarqué que dans des domaines comme celui de l’éducation, il a été difficile de s’adapter pendant la fermeture des classes. Quelques entreprises qui en avaient les moyens ont essayé de s’adapter en mettant leur personnel au télétravail avec des schémas préétablis. Tandis que, les PMEs ont énormément galéré.
« L’Etat même dans son approche de communication vis-à-vis de la crise a également galéré. Nous ne sommes pas préparés et la digitalisation n’est pas encore pleinement un acquis dans la société de manière générale et globale. C’est une évidence et le rapport du GICAM montre ce qui est réel », a ajouté l’expert.
Néanmoins, il espère que la crise sanitaire ouvrira les yeux aux entreprises sur leurs processus de digitalisation. Mais aussi qu’elle fera comprendre aux gens qu’il est question d’avenir et de ce qu’il faut faire pour s’arrimer à un certain nombre de standards. Ce, pour pouvoir prendre s’inscrire dans la dynamique mondiale en cours.
Aurore Bonny