Le lancement officiel de la Plateforme Interopérable du Système de Paiement Instantané (PI-SPI) de l’UEMOA devrait voir le jour ce mardi 30 septembre 2025. Ce projet d’envergure dans l’histoire de l’institution ambitionne de simplifier les transactions pour des millions de citoyens. Il s’inscrit dans une logique de transformation digitale et d’inclusion financière, comme le souligne Serge Kouamelan, directeur exécutif de l’Association professionnelle des banques et des établissements financiers de Côte d’Ivoire (APBEF-CI), affirmant qu’« une révolution silencieuse est en marche ».
(CIO Mag) – C’est une « révolution silencieuse » qui va transformer en profondeur la société, l’économie et la culture dues à l’essor de la téléphonie mobile et des technologies financières (Fintech). En effet, la BCEAO devrait lancer officiellement ce mardi la PI-SPI, rendant désormais possibles les opérations de compte à compte, disponibles 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, quels que soient le type de compte et les acteurs utilisés : comptes bancaires, comptes mobile money et institutions de microfinance (ou Services financiers décentralisés, SFD).
Une révolution pour la vie quotidienne
L’interopérabilité représente une transformation radicale pour les huit pays de l’UEMOA. Le système financier, qui fonctionnait jusque-là comme une série d’« îles isolées », est désormais unifié, se réjouit Serge Kouamelan, directeur exécutif de l’APBEF-CI dans une contribution diffusée par le confrère Financial Afrik.
S’il était complexe d’envoyer de l’argent directement d’une banque à un compte mobile money, ou d’un Émetteur de monnaie électronique (EME) à un autre, cette plateforme entend changer complètement la donne. Grâce à la PI-SPI, un usager de banque peut transférer de l’argent vers un portefeuille mobile, et vice-versa, sans difficulté.
Selon Serge Kouamelan, cette avancée simplifie la vie des populations, éliminant le besoin de posséder plusieurs comptes ou cartes pour effectuer des paiements. De surcroît, elle rend les transactions plus accessibles, y compris pour ceux qui ne possèdent pas de compte bancaire. En sus, la PI-SPI contribue à la baisse des frais grâce à la concurrence et à l’automatisation, tout en garantissant la sécurité des opérations qui passent par une plateforme régulée par la BCEAO.
Impact économique considérable
En tout état de cause, l’impact de la PI-SPI se ressentira sur l’ensemble de l’écosystème financier. Le rapport de l’UEMOA sur l’Évolution des services financiers numériques au titre de l’année 2023 montre que la monnaie électronique a déjà connu une forte croissance au sein de l’UEMOA, avec le nombre de comptes passant de 157 millions en 2022 à 209 millions. La Côte d’Ivoire a été le principal moteur de cette croissance, avec 81 millions de comptes, soit 39 % du total de l’Union. Le Sénégal et le Bénin suivaient avec respectivement 18 % et 15 %.
Cependant, malgré une hausse du nombre de comptes, l’utilisation de l’argent mobile restait faible, en raison de la prépondérance du cash. En 2023, les opérations de dépôt et de retrait représentaient 34 % du volume et 58 % de la valeur totale des transactions.
Dans ce contexte, le lancement du système de paiement instantané interopérable de l’UEMOA devrait permettre d’augmenter les flux de paiements électroniques et de réduire la circulation de l’argent liquide. Ce système, affirme Serge Kouamelan, va dynamiser le commerce local et faciliter la vie des petites entreprises.
En 2023, les virements entre comptes bancaires et comptes de monnaie électronique ont déjà connu une forte hausse, augmentant de 99,51 % par rapport à 2022, pour atteindre 14,8 millions d’opérations. Une tendance que la PI-SPI devrait amplifier, créant un espace financier plus fluide, plus inclusif et plus moderne. Pour les entrepreneurs, cela signifie une gestion plus simple des flux financiers et une intégration facilitée dans l’économie numérique. Pour les populations, envoyer de l’argent à un proche deviendra aussi simple que passer un appel téléphonique, quel que soit l’opérateur ou la banque.
6 ans de travaux et une phase pilote réussie
Les premières discussions autour de l’interopérabilité au sein de l’UEMOA remontent à plusieurs années. Dès le 30 septembre 2019, la BCEAO entamait une concertation avec diverses autorités pour préparer l’intégration de ce mécanisme. L’objectif annoncé était de mettre en place une plateforme régionale dès 2020, capable de faciliter les échanges de compte à compte, quels que soient le type de compte, les acteurs, les instruments et les canaux de paiement utilisés. Cette initiative visait à adopter des services instantanés, tout en respectant des exigences strictes de qualité et de sécurité. Ainsi, l’interopérabilité est un chantier colossal qui implique tous les pays membres de l’UEMOA.
Avant son lancement officiel, la PI-SPI a franchi une étape déterminante avec une phase de tests en conditions réelles, démarrée le 5 juin 2025. Cette phase pilote a permis de confirmer les performances du système, notamment en termes de fiabilité, de sécurité et de fluidité. Un échantillon de clients sélectionnés a pu effectuer des opérations instantanées interopérables, telles que des transferts de fonds et des paiements, indépendamment du type de compte utilisé. Selon la liste mise à jour au 31 juillet 2025, au total 86 établissements ont participé, dont 70 banques, 6 SFD et 10 EME, démontrant un engagement fort de l’ensemble de la sous-région.
La révolution est bel et bien enclenchée.
