Transformation digitale : le renouveau industriel en Afrique

La part de la valeur ajoutée manufacturière au cœur des économies africaines peine à décoller, plafonnant à 11,5% du Produit Intérieur Brut (PIB)[1]. Parallèlement, le secteur industriel ne parvient pas à être un vecteur significatif d’emploi, stagnant à 13% de la force de travail totale. Cependant, dans un contexte où la pandémie de la Covid-19 a ravivé l’intérêt mondial pour les stratégies industrielles, l’Afrique se trouve à un carrefour. L’industrialisation devient un impératif stratégique, et le numérique pourrait bien être le levier que l’Afrique attendait pour accélérer sa transformation industrielle. En effet, le digital se présente comme un allié de taille, capable d’avoir un impact positif sur l’industrialisation à plusieurs échelons. D’une part, il facilite le déploiement d’infrastructures vitales – comme celles liées à l’énergie, essentielles pour tout essor industriel. D’autre part, il dynamise l’entrepreunariat numérique, créant ainsi un terreau fertile pour l’innovation et la compétitivité. Mais plus encore, l’intégration de technologies de pointe au sein des infrastructures industrielles promet de booster la productivité et la compétitivité à des niveaux soutenus. L’Afrique se trouve face à une opportunité unique : celle de bâtir dès le départ des systèmes de production intelligents, interconnectés et durables. Le moment est venu pour l’Afrique de saisir cette chance pour réinventer son avenir industriel.

L’industrie en Afrique : une opportunité pour de nombreux secteurs primaires

Au cœur de l’effervescence industrielle africaine, l’Afrique du Nord se démarque, propulsée par les succès notables de l’Égypte et du Maroc, et dans une moindre mesure, de l’Algérie et de la Tunisie. Ces pays dessinent un tableau d’optimisme industriel que la région subsaharienne, malgré son potentiel, peine encore à égaler. Chaque nation africaine est appelée à sculpter son propre chemin de croissance, en s’appuyant sur ses ambitions, ses ressources, ses atouts distinctifs, et sa capacité à s’insérer intelligemment dans le tissu des chaînes de valeur mondiales. La numérisation de l’industrie a notamment été mise à l’honneur lors du sommet sur la transformation industrielle numérique et intelligente organisé par Huawei lors du Mobile World Congress 2024. L’événement a souligné le rôle crucial du numérique dans l’augmentation de l’efficacité et de la productivité des secteurs industriels.

Dans un continent où l’agriculture demeure le socle de la vie de près de la moitié de la population, et où la souveraineté alimentaire est un objectif stratégique, les liens entre l’industrie et l’agriculture doivent être renforcés. Ceci implique de prioriser le développement de l’industrie agricole comme moteur de l’industrialisation à l’échelle continentale. La population agricole, qui représente en moyenne 48% de la démographie totale et monte jusqu’à 70% dans certaines régions d’Afrique de l’Est[2], pourrait voir son avenir transformé par l’AgriTech. Cette nouvelle vague technologique promet non seulement de les armer contre les rigueurs du changement climatique, telles que les sécheresses et les inondations, mais aussi d’optimiser la gestion des ressources hydriques pour accroître les rendements.

Des initiatives entrepreneuriales ambitieuses fleurissent à travers le continent, visant à numériser l’agriculture africaine. Un exemple est celui de l’équipe algérienne SevenG, lauréate de la région Northern Africa du concours Tech4Good de Huawei, pour son projet innovant FarmAI. Ce dernier, utilisant des drones pour la détection précoce de la rouille des champs de blé, se prépare à entrer en phase de test en Algérie, selon Rania Hedna, membre de l’équipe. Cet élan vers l’innovation ouvre de nouvelles avenues pour une industrialisation africaine résolument tournée vers l’avenir, ancrée dans la durabilité et l’inclusion. Cette application illustre un fait important : l’Afrique est la mieux placée pour relever ses propres défis. Chaque pays développera des industries numériques adaptées à ses besoins et caractéristiques uniques.

L’électrification : un prérequis essentiel pour l’industrialisation du continent

Dans cet élan vers une transformation industrielle audacieuse, l’Afrique se trouve néanmoins confrontée à un défi de taille : l’électrification du continent. La problématique est majeure, avec un tarif électrique qui quadruple la moyenne mondiale[3]. Selon la dernière analyse de la Banque africaine de développement (BAD), le manque d’infrastructures est désigné comme le principal obstacle à une industrialisation réussie.

Pourtant, l’industrie, particulièrement énergivore, pourrait trouver en Afrique un allié inattendu : son potentiel solaire colossal. Le continent, baigné par le soleil environ 3 000 heures par an, détient 60 % des sites les plus prometteurs pour l’exploitation de l’énergie solaire, d’après l’Agence internationale de l’énergie. Un trésor sous-exploité, puisque moins de 1 % de ce potentiel est actuellement mobilisé[4]. L’ère numérique pourrait se révéler décisive, avec l’émergence de solutions innovantes telles que les smart grids ou les systèmes photovoltaïques avancés. Huawei Digital Power a lancé des initiatives pionnières dans ce secteur, notamment des onduleurs et batteries pour une énergie propre et des systèmes de gestion numérisée pour optimiser la production d’énergie solaire. Ces technologies, s’appuyant sur l’IoT (Internet des Objets), le cloud et l’intelligence artificielle, pourraient transformer radicalement l’électrification en Afrique, offrant des solutions sur mesure pour pallier le déficit infrastructurel et favoriser une industrialisation durable.

Comme l’a justement souligné Amadou Coulibaly, Ministre de la Communication et de l’Économie numérique, Porte-parole du gouvernement de Côte d’Ivoire, lors du panel organisé par Huawei Northern Africa « Libérer le numérique pour une Afrique durable et inclusive », à l’Africa CEO Forum l’an passé,  si “le charbon est l’énergie qui a accéléré la révolution industrielle en Europe au siècle dernier, le numérique est aujourd’hui l’énergie qui propulse l’Afrique vers sa révolution industrielle”.

Pour développer son industrie, l’Afrique doit investir dans ses talents

Pour que l’Afrique puisse pleinement saisir le potentiel de son envol industriel et numérique, une pierre angulaire doit être solidement posée : l’investissement dans l’éducation et la formation au numérique et aux Technologies de l’Information et de la Communication (TIC). Cette initiative n’est pas simplement une option, mais une nécessité pour alimenter la dynamique de croissance et d’innovation sur le continent. L’essor des start-ups, véritables moteurs d’innovation, dépend crucialement de l’accès à un vivier de talents formés aux dernières avancées technologiques. Ces jeunes pousses sont en première ligne pour révolutionner des secteurs clés de l’économie, en apportant des solutions numériques adaptées aux défis spécifiques de l’Afrique.

Il s’agit également de préparer le terrain pour une industrie 4.0, caractérisée par l’automatisation, la robotique, l’intelligence artificielle, et une interconnexion sans précédent entre les systèmes physiques et numériques. Une population formée et compétente dans ces domaines est le socle sur lequel reposera la capacité de l’Afrique à non seulement intégrer, mais aussi à innover dans l’économie numérique mondiale. A ce titre, lors du Huawei Talent Summit qui s’est tenu le 26 février au MWC 2024, sous le thème “Cultiver l’Excellence dans un Monde Numérique”, plusieurs initiatives ont été lancées, dont un projet en partenariat avec l’Institut de l’UNESCO pour l’apprentissage tout au long de la vie (UIL) au Maroc, visant à former 10 000 jeunes, enseignants et professionnels de l’alphabétisation aux nouvelles technologies.


[1] Made in Africa : cinq leviers pour accélérer l’industrialisation du continent, Jeune Afrique, 26.02.2024

[2] LES AGRICULTURES AFRICAINES, Nations Unies.

[3]  Made in Africa : cinq leviers pour accélérer l’industrialisation du continent, Jeune Afrique, 26.02.2024

[4] L’Afrique parviendra-t-elle à faire sa révolution solaire ?, Jeune Afrique, 19.12.2023

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