Invité d’honneur du Digital African Tour 2022 qui se tiendra au Maroc, Barthélémy Dias, maire de Dakar, par ailleurs député à l’Assemblée Nationale, aborde avec CIO MAG plusieurs questions. De la notion de durabilité au projet de Smart City, en passant par les mécanismes de financement, il aborde tout. Pour lui, faire de Dakar une ville smart, ce n’est pas qu’un souhait, c’est une exigence.
Propos recueillis par Mamadou Diop
Cio mag : M. Le Maire, vous êtes parmi les invités d’honneur DAT-Maroc 2022. Qu’est ce que cela vous fait ?
Barthélémy Dias : C’est un honneur pour moi de faire partie des invités du Digital African Tour 2022, qui est un évènement de grande importance pour les acteurs de la transformation digitale et les collectivités territoriales en Afrique. C’est toujours un plaisir pour un maire de contribuer à la réflexion et à la proposition de solutions pour le développement des villes africaines, surtout quand celles-ci intègrent des problématiques liées à l’intelligence urbaine et de l’innovation locale. S’y ajoute que l’édition 2022 se déroule au Maroc qui est un pays ami et frère du Sénégal, eu égard aux liens profonds et séculaires qui unissent nos deux peuples. Je profite de l’occasion pour remercier les organisations du Digital African Tour 2022 qui, à travers ma personne, font honneur à la ville de Dakar.
Le thème de cette édition est : « Villes africaines, comment concilier développement durable, modernisation et innovation ». Qu’est-ce que cela vous inspire ?
C’est un thème d’actualité et en ma double qualité de citadin et maire d’une capitale africaine, cela m’interpelle à plus d’un titre. Je dois rappeler que la moitié de la population mondiale vit dans les villes. Cet afflux n’est pas sans conséquence sur l’urbanisation, les écosystèmes, l’utilisation des énergies, l’occupation de l’espace entre autres. Dès lors, les villes, surtout africaines, ont un rôle essentiel a joué dans la conception et la mise en œuvre de programmes modernes et innovants d’aménagement durable.
J’estime que nos villes, de par leur densité et la jeunesse de leurs populations, doivent être portées vers un développement durable qui intègre l’amélioration de la qualité de vie des citadins, la satisfaction de leurs besoins actuels, mais aussi anticiper sur leurs besoins futurs. Pour y parvenir, il nous faut développer des actions d’intelligence urbaine au profit du citadin et de l’environnement.
CIO MAG : Justement quelle place occupe la notion de durabilité dans vos projets pour la Ville Dakar ?
Barthélémy Dias : La durabilité occupe une place de choix dans les projets et programmes de la ville de Dakar. D’ailleurs, notre projet politique qui a rencontré l’adhésion des dakaroises et des dakarois porte sur la vision « Dakar, ville résiliente et attractive, qui valorise le capital humain ». En tenant compte du contexte propre à la ville de Dakar, nous nous engageons dans la dynamique d’un développement durable harmonieux.
Je précise que Dakar est la première ville de l’Afrique de l’ouest à s’être dotée d’un Plan Climat Energie Territorial (PCET). L’efficacité énergétique dans les bâtiments administratifs, la rénovation thermique des centres de santé, le développement d’une mobilité durable et la promotion des énergies renouvelables, sont autant d’actions qui sont prises en compte dans le PCET de la ville de Dakar.
Sans parler du programme de « relamping » de l’éclairage public qui poursuit des objectifs à la fois d’efficacité, d’efficience et d’économie d’énergie. L’agriculture urbaine avec le programme de micro jardinage qui permet la production des légumes et des herbes hors-sol sur des superficies réduites comme les toits, les balcons, les jardins et même des pneus et des petites boîtes recyclées installées sur des tables en bois. Toutes ces actions contribuent à transformer Dakar en une ville durable, écoresponsable et résiliente au changement climatique.
Les villes numériques sont de plus en plus à la mode. Avez-vous des projets dans ce sens ?
La digitalisation urbaine est au cœur de nos préoccupations. La population de Dakar étant très jeune et très connectée, nous devons, en tant que pouvoir public, suivre l’air du temps. C’est la raison pour laquelle dans notre programme nous ambitionnons de connecter Dakar à travers deux projets.
Le premier « Dakar à l’heure » consiste à installer des horloges urbaines dans certains ronds-points et axes stratégiques de la ville dans le but d’améliorer la culture de la gestion du temps des agents économiques. Le second projet « Dakar Lifi » pour offrir un accès internet gratuit à tous, sur les zones stratégiques du territoire urbain et de mettre en place un portail captif d’accueil pour les informations utiles. Je pourrais ajouter le projet « école intelligente » avec la mise en place de médiathèque en ligne pour les élèves et étudiants.
Peut-on s’attendre à ce que Dakar devienne une smart City ?
Dakar sera une ville intelligente. A l’instar des grandes villes du monde, Dakar se positionne comme une ville compétitive et attractive. Depuis notre élection, nous travaillons à améliorer la qualité de vie des dakaroises et des dakarois mais également la qualité de services en nous appuyant sur les nouvelles technologies. Et je suis convaincu que la réalisation de tous ces projets que nous venons d’énumérer propulsera la ville de Dakar dans le cercle des smart City. Dakar ville smart ce n’est pas qu’un souhait, c’est une exigence et nous nous donnerons les moyens de l’atteindre.
Quels mécanismes de financement préconisez-vous pour les villes durables ?
Pour les villes africaines, le besoin d’infrastructures et de services est réel mais les moyens font souvent défaut. A ce titre, accéder aux marchés de capitaux pour trouver des fonds apparait comme un bon mécanisme de financement des infrastructures durables. Ce qui, pour le moment, n’est pas le cas pour la plupart des villes africaines. Dès lors, l’appui des partenaires techniques et financier qui accompagnent développement urbain durable est un bon levier sur lequel les villes devraient s’appuyer pour bénéficier des finances climat.
Toutefois, cela ne doit pas nous faire perdre de vue que pour avoir des villes durables, connectées, efficientes et résilientes nous devons, avant tout, nous appuyer sur nos propres ressources.