Dans cet entretien, Marc ALINAT partage sa vision sur la mutualisation des ressources informatiques pour accélérer la transformation numérique dans les économies en croissance. Il préconise une plus grande collaboration entre l’économique et le politique pour mieux aborder les grandes tendances de l’IT comme le Cloud, la cyber-sécurité ou encore le Big Data. Avec le rapprochement entre Atos et Bull, il évoque également le positionnement d’Atos en Afrique.
Après le Sénégal, la Côte d’Ivoire, c’est la seconde participation du Groupe Atos aux Africa IT Forum. Quelle est votre impression ?
C’est globalement très positif pour nous d’autant plus que cela rentre dans le cadre de la stratégie de développement de nos activités en Afrique. En Côte d’Ivoire, nous avons ressenti la forte volonté des autorités du pays dans le soutien aux initiatives liées au développement du numérique. Ce rôle de facilitateur ne s’exprime pas seulement dans les mots mais aussi dans l’exemplarité des projets gouvernementaux en cours.
Vous avez fait une présentation sur la contribution du Cloud pour aider les économies en forte croissance. Comment cela a-t-il été perçu ?
Dans ces économies en phase de transition et de transformation, si l’Etat n’impulse pas la dynamique pour favoriser le développement du Cloud, c’est quasi impossible pour les entreprises de mener à bout des projets. Il est essentiel que le politique et l’économique collaborent pour favoriser le déploiement des infrastructures nécessaires au développement de l’économie numérique. Dans les échanges que j’ai eu et notamment avec Monsieur Soro, Directeur Général de la SNDI, j’ai pu mesurer l’ambition de l’Etat Ivoirien en matière de réalisations de projets structurants dans le secteur du numérique. J’ai été impressionné par sa vision enthousiaste et son pragmatisme dans la mise en œuvre des projets en cours. Je me suis senti très proche de ses idées notamment dans la façon d’aborder les grandes tendances de l’IT comme le Cloud, la cyber-sécurité, les nouveaux outils collaboratifs, la mobilité, le Big Data etc…. Toutes ces grandes tendances ont un dénominateur commun : elles sont résolument tournées vers de nouveaux usages et vers une plus grande accessibilité aux services. Leur mise-en-œuvre est très exigeante en termes de rationalisation des coûts et de mutualisation des ressources techniques. Cela implique fondamentalement une orientation vers un modèle de partage des investissements qui permette de rendre un service au plus grand nombre. Un des bénéfices étant bien sur un coût économique très significativement plus bas que les approches d’investissement IT traditionnel. Il s’agit économiquement de facturer l’usage et rien que l’usage tout en masquant la complexité des composantes techniques et organisationnelles à mettre en œuvre.
Pensez-vous que ce modèle de partage est viable ?
Si on fait le parallèle avec le secteur des « Utilities », on voit bien que lorsque l’usager achète un service comme avoir de l’eau chaude et de l’eau froide, il ne souhaite évidemment pas se préoccuper de l’infrastructure permettant d’acheminer l’eau : les canalisations, la plomberie, etc…Il veut seulement consommer l’eau dont il a besoin et être facturé sur sa consommation. C’est exactement la même motivation qu’il faut adresser aujourd’hui avec les technologies de l’information.
Ces nouveaux modèles de « consommation » de l’IT sont fondés sur la même idée, le partage et l’usage. Ils permettent aux économies à forte croissance d’aller directement à la cible en terme de solutions et cela sans que chaque entreprise ou acteur de l’économie ait besoin individuellement de rattraper ou combler le déficit en matière d’infrastructures informatiques. Il faut donc encourager l’alignement des acteurs du privé et du public pour aller vers la cible dans un modèle où tout le monde est gagnant. Si l’on prend l’exemple du Cloud qui est fondé sur la centralisation et le partage des ressources, son modèle de déploiement permet à un plus grand nombre d’acteurs d’accéder à des technologies de l’information et de la communication innovantes qu’une entreprise, prise individuellement, ne peut pas réaliser toute seule. Il y a aujourd’hui une accélération de l’accès à l’information. La mutualisation des ressources informatiques permet de répondre à cette accélération en facilitant l’accès aux outils collaboratifs, aux Big Data ou encore à la mobilité.
Quelle est l’offre d’Atos dans ce domaine notamment en Afrique?
Ces nouveaux usages obligent à combiner de multiples compétences et couches technologiques qui vont des Data Center aux infrastructures, aux serveurs en passant par la base de données, les applications, la sécurité, etc….
Il est complexe de rendre un service performant et sécurisé dans un contexte où ces nouvelles solutions reposent sur la fourniture de services qui étaient traditionnellement organisés en silo en termes de compétences et de services.
Atos a un savoir-faire unique dans sa capacité à accompagner le bon fonctionnement des organisations tout en gérant la complexité des différentes composantes techniques et à fournir un servir de bout en bout. L’objectif de nos offres C.E.S (Cloud Enterprise Software) est de garantir l’exploitation des solutions, d’accompagner le changement et l’adoption, et surtout de garantir le transfert de compétences vers les métiers. En effet le principal intérêt de ces nouveaux usages c’est justement de garantir l’adoption et l’autonomie des métiers. En l’occurrence dans les pays émergents il s’agit de garantir l’autonomie des organisations gouvernementales afin qu’elle puisse jouer leur rôle clé d’agent du changement pour le déploiement de l’économie numérique.
Pour illustrer ce type d’offre innovante, nous avons développé des offres de bout en bout qui permettent par exemple à une société de gérer une solution centrale au niveau groupe de type SAP qui va elle-même communiquer avec une solution satellite en mode Cloud pour les petites ou moyennes organisations de cette société. Cette solution satellite intégrée avec SAP, s’appelle Yunano. Yunano est une suite ERP et CRM que nous fournissons en mode Cloud à un coût économique extrêmement attractif pour les pays émergeants (environ 2 à 3 fois moins chères que les approches ERP traditionnelles). Toutes ces nouvelles offres en mode Cloud du portfolio Atos C.E.S bénéficient de l’expérience et de la maitrise des enjeux de la sécurité acquise par Atos au travers de grands programmes comme la gestion de l’IT des Jeux Olympiques.
Atos a annoncé le rachat de Bull déjà bien présent en Afrique. Avec ce rapprochement, quelle sera votre approche du marché africain ?
L’offre de rachat Bull est enclenché depuis quelques semaines, elle se poursuivra jusqu’à fin août – début septembre. Le rapprochement des deux groupes rentre dans le cadre d’une stratégie de leadership concernant les grandes tendances du marché de l’IT. Ce rachat nous permettra de devenir, sans conteste, le leader européen du Cloud, de la Cyber-Sécurité et du Big Data. Au-delà des logiques de complémentarité technologiques, il y a aussi un renforcement et une accélération des positions d’Atos
• sur un certain nombre de territoires géographiques notamment en Afrique.
• dans la fourniture de services au secteur public par l’accompagnement des organisations sur des projets critiques relevant de la défense, la sécurité etc…
En ce qui concerne l’Afrique au-delà du rapprochement avec Bull, nous venons d’annoncer la création d’un Global Delivery Center au Sénégal. Ce G.D.C consiste à fournir des services à valeur ajouté en Afrique et dans le monde. Avec notre présence au Maroc et en Afrique du Sud, nous poursuivons notre encrage de façon durable sur le continent africain.
Interview réalisée par Mohamadou DIALLO
Paru dans Cio Mag 32