Par Yacine Barro, Directrice générale Afrique de l’Ouest et centrale de Microsoft
(CIO Mag) – Le trafic mondial dans le cloud devrait atteindre 8,6 zettaoctets d’ici 2019. Bien que le cloud soit présent en Afrique, il accuse un retard par rapport aux pays développés. Cependant, selon de récents rapports, l’Afrique et le Moyen-Orient devraient, dans les années à venir, enregistrer la plus forte croissance en matière de services du cloud.
En effet, l’infrastructure du cloud computing de la région devrait se développer à un taux de 42 % par an, dépassant largement la moyenne mondiale de 33 %. Ce développement sera dans une large mesure encouragé par la révolution mobile sur le continent.
Le cloud computing offre aux organisations une occasion unique d’améliorer leurs opérations, quel que soit leur secteur. Comptant parmi les principaux moteurs de la transformation numérique, il bouscule le modèle traditionnel des technologies de l’information et réduit considérablement les délais de commercialisation ainsi que l’infrastructure et les coûts opérationnels requis pour les nouvelles innovations.
Encourager l’adoption du cloud contre vents et marées
La question est la suivante : comment faire en sorte que l’Afrique adopte la technologie du cloud à grande échelle, dans un contexte où le manque d’accès à Internet, les problèmes d’alimentation électrique, les menaces pour la sécurité et même l’analphabétisme perpétuent le retard accusé dans l’adoption des technologies de l’information ?
Au cours des quatre dernières années, Microsoft – par l’intermédiaire de son initiative 4Afrika – s’est employé à développer un accès à Internet à un prix abordable, des compétences et des innovations en Afrique de l’Ouest dans le but d’augmenter la capacité d’utilisation de la technologie du cloud et d’accélérer la transformation numérique. Nous pensons que la transformation numérique ne peut être efficace et utile que lorsqu’il existe une connectivité du dernier kilomètre, les compétences et la confiance nécessaires pour exploiter la technologie, et des solutions pertinentes à l’échelle locale.
Connecter les citoyens pour encourager la transformation numérique
Il existe en Afrique de l’Ouest un grand nombre d’organisations qui utilisent des moyens innovants de connecter les communautés rurales et mal desservies à Internet à un prix abordable. En 2016 et 2017, Microsoft a investi dans trois d’entre elles, à savoir Ekovolt au Nigeria, VisionNet et WrightGrid en République Démocratique du Congo (RDC).
VisionNet utilise le Wifi géré dans le cloud pour offrir un accès à Internet à faible coût aux étudiants universitaires ruraux, par l’intermédiaire de Pocket Cyber Cafés. De la même manière, WrightGrid fournit une connectivité à travers des postes de recharge de téléphone et d’accès internet sans fil fonctionnant à l’énergie solaire qu’elle conçoit, fabrique et installe dans les espaces publiques. Dans un pays de 79 millions d’habitants où seuls trois millions de personnes ont accès à Internet, où le revenu moyen est de 394 $ par an, et où l’alimentation électrique demeure problématique, ces deux entreprises apportent une valeur significative. Avec le soutien de Microsoft, VisionNet espère fournir 24 heures d’accès internet illimité à des taux inférieurs à ceux pratiqués sur le marché.
Ekovolt a, quant à elle, créé une offre combinée de connectivité et de technologie. Elle associe ses services Volt Internet avec des solutions du cloud pour proposer des offres groupées d’accès à Internet et de solutions d’entreprise personnalisées aux petites et moyennes entreprises – des solutions que l’on ne trouve habituellement que dans les grandes sociétés.
Au Ghana, Microsoft et Spectra Wireless ont lancé le premier projet d’espace blanc de télévision commerciale en Afrique. Grâce à ce projet, les étudiants de l’Université de Koforidua peuvent accéder à des offres de données à partir de seulement deux cedis ghanéens par jour. Avant ce projet, seuls 9,48 % des étudiants utilisaient quotidiennement un ordinateur à l’école pour le traitement de texte, 4,74 % pour l’analyse de données, 3,45 % pour l’écriture de codes et 25 % pour l’Internet. Plus de 6 000 étudiants sont désormais connectés à des services et à du matériel abordables dans le cadre d’un plan de financement à taux zéro.
Ces étudiants peuvent non seulement accéder à une abondance de nouvelles connaissances, mais les compétences qu’ils acquièrent en utilisant ces outils auront aussi, à terme, une incidence sur la capacité d’action du Ghana en tant que pays numériquement transformé.
Secteurs visés par la transformation numérique
Une fois connectés et dotés des compétences nécessaires, les Africains peuvent utiliser la technologie pour opérer la transformation numérique dans les secteurs tels que les soins de santé, l’énergie, l’éducation et l’agriculture. En RDC, le secteur minier du pays est le fer de lance des efforts en faveur de la transformation numérique.
De nombreuses entreprises au Ghana utilisent une sorte de service cloud ; les banques, notamment, utilisent le cloud privé. Dans le Rapport mondial 2015 sur les technologies de l’information publié par le Forum économique mondial, le Ghana a été classé 101e sur 143 pays à travers le monde en termes d’usages des TIC au profit des secteurs économique et social.
Le Nigeria pourrait potentiellement économiser près de 5,6 milliards de dollars par an s’il opérait la transformation numériquement et intégrait le système d’information et de communication de son secteur public. Le cloud computing pourrait aussi générer environ 1 milliard de dollars au cours des 10 prochaines années.
En partant de ce constat, le ministère fédéral de l’Industrie, du Commerce et de l’Investissement (MITI) s’est récemment rallié au programme Open4Business de l’initiative 4Afrika en vue de transformer la prestation de ses services à la communauté des investisseurs. En mettant à profit la technologie du cloud, le MITI permet aux investisseurs d’accéder plus facilement aux renseignements qui les intéressent, réduit les délais et les coûts qu’ils consacrent à la constitution et au maintien de leurs entreprises, et communique de manière proactive les possibilités d’investissement. Ce faisant, il crée un environnement plus propice à l’investissement, améliore la facilité de faire des affaires au Nigeria et accélère la création d’emplois.
Transformer le secteur des PME
Le cloud computing a le potentiel de révolutionner le secteur des PME en permettant aux entrepreneurs de moderniser leurs entreprises, d’enrichir leurs offres et d’atteindre de nouveaux clients. Selon le rapport Foresight Africa 2017, l’adoption des technologies est le principal moteur de croissance des PME sur le continent africain. Les PME qui adoptent la technologie numérique se développent deux fois plus vite que celles qui s’en passent.
D’après le rapport de recherche publié par IDG Connect, le Nigeria, avec l’Afrique du Sud, possède le taux d’adoption du cloud le plus élevé en Afrique. Par ailleurs, Microsoft a également remarqué que le Nigeria possède le taux d’absorption de ses produits du cloud le plus élevé sur le continent, et que cette absorption est en hausse dans le secteur des PME. C’est pour cette raison que certains de nos cadres l’ont surnommé la « capitale du cloud ».
Pour donner les mêmes moyens à un plus grand nombre de PME, nous nous sommes récemment associés à la Fondation Tony Elumelu (TEF) au Nigeria pour mettre à disposition de plus de 3 000 entrepreneurs du Programme d’entreprenariat TEF des outils, des ressources, des formations et des mentorats axés sur les technologies.
Au Ghana, nous avons récemment apporté notre concours à la startup locale Swiftly spécialisée dans le « e-shipping » par l’entremise du programme Interns4Afrika. Douze stagiaires ont eu la possibilité de participer à des recherches de marché, à des activités de génération de prospects, de marketing en ligne, de programmation, de planification d’évènements et de service à la clientèle. Un programme tel que celui-ci profite non seulement à la startup qui a accès à de jeunes et nouveaux talents, mais procure aussi aux jeunes diplômés l’expérience professionnelle et les outils dont ils ont besoin pour apporter leur contribution à une économie numériquement transformée.
Vers un avenir numériquement transformé
La transition vers le cloud ne va pas se faire en un jour. Elle demande une vision et des efforts délibérés de la part des entreprises. Pour mener à bien cette initiative, nous devons adopter cette technologie pour opérer la transformation numérique, et continuer ainsi à innover et à être pertinents.
L’adoption du cloud révolutionnera la manière dont les entreprises ouest-africaines, et notamment les PME, fonctionnent. Alors que le pouvoir du cloud computing continue à s’affirmer en Afrique, l’initiative 4Afrika reste déterminée à accélérer l’adoption du cloud et la transformation numérique sur le continent grâce à un accès accru à la technologie et à la transmission des compétences nécessaires, en vue d’améliorer le développement socio-économique.