Didier Simba, responsable de la Sécurité des Systèmes d’Information au sein du Groupe BPCE, le second groupe bancaire en France est avant tout un Gabonais aux faîtes et impliqué dans le développement numérique de son pays. Il a livré à Cio Mag, son regard sur l’écosystème numérique au Gabon.
(CIO Mag) – Ce pays d’Afrique Centrale fait environ 2 millions d’habitants. Un nombre assez loin de la moitié des populations de certaines grandes villes africaines. Pour le fondateur et le président du Club d’experts de la sécurité de l’information en Afrique (CESIA), un réseau africain d’expert en Cyber sécurité exclusivement réservé aux Directeurs des systèmes d’information (DSI) et aux Responsables de la sécurité des systèmes d’information (RSSI), ce chiffre est aussi à l’origine du peu de notoriété du Gabon.
Toutefois, note-t-il, l’économie nationale a longtemps été basée sur sa matière première telle que le pétrole ou le bois. Un contexte dans lequel les populations étaient plus attirées par le travail de la fonction publique que l’entreprenariat. Depuis lors, les dirigeants du pays voulant multiplier les actions d’économie ont commencé à multiplier les initiatives bien que perfectibles autour de l’entreprenariat et particulièrement numérique.
« Il y a une volonté marquante d’entreprendre. Bien des choses sont faites par des entrepreneurs, quoiqu’elles ne soient pas assez vulgarisées ou médiatisées », remarque Simba.
Il a par exemple noté l’e-éducation étant « mieux avancé » et aussi boosté par la crise sanitaire liée à la Covid-19. Lors du concours national des talents numériques où il a été invité en tant que président du jury au Gabon, il a aussi relevé de nombreux talents dans tous les secteurs. Lesquels ont développé des solutions innovantes sur le secteur de l’éducation et la sensibilisation.
« Il y a aussi des projets très porteurs dans le domaine de la santé. Par exemple avec la possibilité de commander depuis chez soi des médicaments ou consulter les pharmacies proches. Beaucoup de jeunes osent et tentent de multiples solutions », a-t-il ajouté.
Sans oublier le secteur du paiement mobile grâce auquel depuis son smartphone tout Gabonais peut effectuer des règlements.
« C’est une grande avancée sur le territoire gabonais », a affirmé le spécialiste.
D’après lui, le gouvernement également impliqué a permis d’ouvrir l’accès au marché public au secteur privé à ces entrepreneurs.
« Des budgets ont été mis en place en 2019 avec les investissements de 10 milliards pour accompagner les PME dans l’obtention des capitaux. Face à cet investissement l’office national de l’emploi (ONE) et le gouvernement ont mis en place un fond intitulé ‘One entreprendre’ destiné à l’autonomie des handicapés et aux sans emplois », a-t-il cité.
D’après lui, le projet e-gouvernement à horizon 2025 a également permis de renforcer les infrastructures, augmenter le taux de pénétration d’internet au Gabon, mais aussi des smartphones poussant les jeunes à imaginer et se lancer. Il se dit « totalement satisfait » de ce dernier aspect.
Obstacles et solutions
Cependant malgré ces actions gouvernementales il y a lieu de se demander si « les populations sont mal informées ? Ou si les acteurs de prise en charge de ces accompagnements ne communiquent pas assez ? »
Pour l’expert en cyber sécurité, les entrepreneurs ne vont pas toujours aux portes des informations et ne savent pas auxquelles frapper pour obtenir les fonds mis à disposition. Tandis que, les organismes ne communiquent pas convenablement.
« En somme, il plane un air d’hésitation renforcé par des scandales économiques et administratifs. Il y a eu beaucoup de pertes d’argents. De ce fait, les investisseurs craignent des pertes d’investissement ».
D’un autre point, l’importante implication des jeunes dans la création des solutions au besoin est « une offre supérieure à la demande », regrette-t-il. Les causes de cette situation étant multiples.
« Premièrement, le pays est en train de timidement prendre son virage, les consciences sont éveillées et les acteurs entrent à peine dans l’écosystème. Deuxièmement, il y a un manque important de communication et de sensibilisation », a-t-il rapporté. Pour y remédier et améliorer l’écosystème des jeunes pousses dans son pays, il préconise l’incitation des investisseurs à venir au Gabon.
« Il faut leur donner envie en leur montrant qu’il y a de quoi faire. Bon nombre d’entre eux ne savent pas par où passer. Le manque de communication et de visibilité au-delà nos frontières est un frein aux investissements », a-t-il précisé.
De ce fait « le gouvernement et les acteurs impliqués doivent sensibiliser. Ils doivent également aider les jeunes à se défaire de leurs craintes ».
Pour Didier Simba, « les jeunes sont encore limités par des barrières de la crainte. Notamment d’avoir leur projet volés par des hautes personnalités ou tout simplement bloqués ».
Par ailleurs une fois lancés, ils doivent aspirer à exporter leurs solutions vers d’autres pays.
« Et pourquoi pas devenir des grandes multinationales » ? Il reste convaincu qu’il faut « juste tenir les entrepreneurs par la main vers le trajet adéquat ».
Aurore Bonny