IGF 2020 : la Covid-19 au profit de la révolution digitale au Congo

Pour parler de l’internet et son apport dans la lutte contre la crise sanitaire provoquée par le coronavirus (Covid-19) , ses perspectives et ses transformations, la seconde édition du Forum sur la gouvernance de l’internet (IGF) en République du Congo a démarré jeudi 18 juin en visioconférence et se termine vendredi.

(CIO Mag) – La pandémie du coronavirus limite certes les déplacements mais n’empêche clairement pas des rendez-vous comme celui-ci de se tenir. Les TIC, sujet important de cette rencontre, ont permis à trois ministres de se réunir pour aborder les questions y afférentes.

Il s’agit de Léon juste Ibombo, ministre en charge de l’Economie numérique, Jacqueline Lydia Mikolo, sa collègue chargée de la Santé, et aussi de Jean Bruno Richard Itoua, ministre de l’Enseignement supérieur. Rodrigue Guiguemde, directeur général du Développement de l’industrie numérique au Burkina Faso faisait également partie de ce premier panel.

Il ressort de cette première journée que l’internet par le champ des possibles qu’il offre est une véritable révolution technologique. Laquelle « s’est même accélérée avec la pandémie du Covid-19. Chaque jour, la liste des évolutions s’allonge : avec l’intelligence artificielle, l’Internet des objets, et plusieurs autres encore qui laissent envisager d’immenses progrès en matière de santé, de sécurité, de culture ou d’éducation», a fait remarquer le ministre Ibombo.

Considérant l’internet et la question sur sa gouvernance comme prioritaires, il a noté qu’il s’agit d’ailleurs de la sphère ayant su se montrer résistante et efficace dans la lutte contre la pandémie alors que d’autres domaines sont passés au ralenti.

Pour le ministre de l’Enseignement supérieur, la crise se présente comme une opportunité de faire l’analyse des systèmes de gouvernance, des systèmes de santé et technologiques, et de tout ce qui peut contribuer à la riposte.

« C’est le moment où il faut épuiser tous les trésors d’imagination et d’innovation, de créativité pour faire face à quelque chose d’inédit. Quelque chose dont personne n’avait la solution. C’est l’occasion de faire franchir un cap. On apprend beaucoup sur ce qui n’est pas parfait, ce qui est insuffisant, ce qu’on ne savait pas et sur ce qu’on n’avait pas envisagé. Ainsi, l’après (Covid-19) doit être différent de l’avant », a expliqué Richard Bruno Itoua.

Au niveau du ministère qu’il chapeaute, il a précisé que la crise n’a pas rendu le recours au numérique inédit. Cependant, elle a fait considérer l’obligation d’être en avant-poste de l’information scientifique au-delà d’internet en collaboration avec des partenaires pour améliorer l’aspect de l’information et de la communication.

Aspect sur lequel d’après lui, la pandémie exige beaucoup d’efforts. En plus de la sensibilisation et de la mobilisation communautaire afin que l’opinion s’approprie la maladie et sa gravité. Mais aussi ses obligations individuelles qui s’intègrent aux obligations collectives. « Le numérique doit être utilisé à fond parce que nous avons l’atout des populations majoritairement jeunes. Lesquelles l’emploient déjà en permanence. C’est sans doute le meilleur vecteur de communication et de sensibilisation disposé. On peut aussi se réjouir des efforts du gouvernement », a-t-il affirmé.

Faible connectivité, handicap pour la santé

Au niveau du ministère de la Santé, la ministre Lydia Mikolo a aussi évoqué la question des communications et a rapporté les efforts fournis dans la gestion de la pandémie et des catastrophes. En effet, le ministère de la Santé met le système d’information au cœur de tous les dispositifs. Soit les alertes, la surveillance ou la riposte.

« Il joue un rôle capital dans la gestion de l’information pour prévenir et contrôler les conséquences des risques sanitaires sur la population et l’environnement », a-t-elle déclaré. Même si elle reconnait la difficulté dans laquelle la pandémie plonge les pays en voie de développement à cause de « la fragilité de leurs systèmes de santé mais aussi du fait de leur faible connectivité à internet ».

Elle voit en ce problème d’internet « un handicap majeur » dans les structures sanitaires pour l’amélioration des performances du système de santé en général. Pour remédier à cela, plusieurs actions ont été entreprises. Entre autres, la collaboration avec le ministère du Digital, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Union internationale des télécommunications (UIT) dans l’élaboration de la stratégie de développement du système d’information sanitaire et de la cybersanté 2020. Laquelle stratégie s’inscrit dans le cadre du plan de digitalisation national.

Lydia Mikolo a aussi défendu la gestion des données sanitaires au Congo. Particulièrement dans le domaine de la santé. Il en ressort que les districts sanitaires du pays ont des responsables connectés. Ce qui permet de faire la collecte des données au niveau des départements et d’informer le gouvernement sur l’état de santé des populations.

« Sans cette informatisation il serait difficile de mettre en place l’assurance par exemple et le remboursement des frais de santé dans les structures de santé », a-t-elle dit. Et d’ajouter : « Il y a des outils mis en place pour sécuriser les données sanitaires. Nous avons une base de données pour toutes les pathologies sur le territoire nationale qui sont toujours sécurisées. Deux directions informatiques spécifiques gèrent cet aspect. »

En termes de confidentialité de ces données, elle s’est défendue par le fait qu’il n’y ait jamais eu de fuite de données depuis le temps que le pays est engagé dans ce processus.

Évoquant aussi la question de la communication dans le contexte sanitaire actuel, elle a affirmé que les moyens de communication sont indispensables pour sensibiliser les populations sur les risques sanitaires, contrôler les chaines de contamination et maitriser les chaines d’évolution épidémiologique.

Cependant, face au fléau des fake news et celui de la désinformation, elle voit en l’usage des TIC et de l’internet « une opportunité pour favoriser une communication interactive saine et dynamique ». Mais également des atouts majeurs pour relever les défis de sensibilisation de la population, de la collecte et du traitement de données sanitaires pour la riposte.

Coronavirus, un accélérateur de digitalisation

Tout comme le ministre de l’Enseignement supérieur, Rodrigue Guiguemde trouve que la crise a permis une remise en question. Selon lui, elle a fonctionné comme une loupe permettant de voir l’essentiel plus clairement.

« Nous avons vu à quel point il est important d’avoir accès à des informations et services fiables en temps réel. La crise a également agi comme un accélérateur sur les projets et initiatives de digitalisation en très peu de temps. Beaucoup d’entre nous ont appris à gérer les conférences en ligne, l’enseignement à domicile et d’autres outils numériques que beaucoup n’avaient pas utilisés avant », a-t-il déclaré.

Dans un même élan que ses co-panélistes, il a aussi constaté que la numérisation offre des outils de lutte contre la propagation du virus et permet d’atténuer les impacts économiques. Cependant, face aux défis de ces dispositions, il trouve important le rôle de sensibilisation des acteurs de l’écosystème au niveau local et au niveau international. Ce, dans le strict respect des règles de fonctionnement édictées par les structures habilitées à tous les niveaux.

Le second panel s’est étalé sur le thème des infrastructures face aux défis du télétravail et de l’éducation au Congo. Louis Marc Sakala le directeur général de l’Agence de régulation des postes et communications électroniques (ARPCE), Ayham Moussa le directeur général de MTN Congo, Yvon Didier Miehakanda, un consultant en transformation digitale, étaient les conférenciers. Crepin Nguimbi, le directeur général d’Infracom, a dirigé le débat.

En perspectives, il a été annoncé par le ministre de l’Economie numérique que l’arsenal juridique national récemment disposé, sera complété par le projet de ratification de la convention de l’Union africaine dite convention de Malabo sur la cyber sécurité et la protection des données à caractère personnel.

Tandis que l’élaboration du texte de loi visant à ratifier la convention de l’Union Européenne dite convention de Budapest sur la cybercriminalité est également en cours. Il parachèvera la mise en place du dispositif juridique et institutionnel national ainsi que la Commission nationale de protection des données.

Il a également annoncé la finalisation prochaine de la construction de l’infrastructure de télécommunications à très haut débit entre le Gabon et le Cameroun. Par ailleurs, des projets de e-bourse, e-taxe, e-douane pour numériser les services et épargner les tracasseries de déplacement aux citoyens sont également sur la table du ministre.

Aurore Bonny

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