« Le satellite contribue à combler le fossé entre le réseau terrestre et les ‘zones blanches’ par une diffusion des chaînes TV aux foyers équipés pour la réception satellite. »
Entretien réalisé par Anselme AKEKO
CIO Mag : D’après une récente étude de Nielsen, 68% des ménages de Côte d’Ivoire reçoivent la télévision par satellite, ce qui correspond à 1,5 million de foyers. Comment expliquez-vous que cette technologie soit la voie majoritaire d’accès à la diffusion numérique télévisuelle dans notre pays ?
Christoph Limmer : Le satellite est une infrastructure qui connait un grand succès en Côte d’Ivoire pour deux principales raisons. D’une part, l’offre terrestre est limitée à sept chaînes. Avec le satellite, vous pouvez offrir un plus grand choix de chaînes. D’autre part, avec une infrastructure terrestre, les chaînes n’ont pas une couverture à 100 % du territoire. Cela signifie que dans certains cas, vous avez des chaînes qui ne peuvent être regardées que dans certaines zones de la Côte d’Ivoire. Le satellite peut permettre de diffuser ces chaînes dans tout le pays.
La même étude menée par Nielsen sur la réception de la TV par satellite en Afrique montre un taux de réception de 29% parmi les ménages équipés d’un téléviseur (21,3 millions sur 73,5 millions), contre 21% en 2013. Quels sont les facteurs à l’origine de cette progression ?
Deux éléments combinés sont à l’origine de cette progression : l’ascension des classes moyennes sur le continent, qui disposent d’un pouvoir d’achat accru, et la baisse du prix des téléviseurs.
Quelle implication souhaitez-vous des bailleurs de fonds ou des autres partenaires au développement pour démeurer sur cette trajectoire de croissance ?
Les entreprises présentes sur le continent jouent déjà un rôle majeur dans ce domaine. Les grands fabricants mondiaux de matériel TV ont bien compris le contexte africain sur le marché de la télévision et adaptent maintenant leurs produits par rapport à ce marché. A titre d’exemple, certains fabricants de téléviseurs incorporent une batterie permettant ainsi au téléviseur de continuer à fonctionner en cas de coupure de courant, un phénomène courant sur le continent. Certains téléviseurs fonctionnent également à l’énergie solaire pour répondre au problème d’électricité. Tous ces facteurs jouent un rôle clé dans l’augmentation du taux de pénétration de la télévision.
Avec les 40 satellites dont dispose Eutelsat, sans compter ceux de vos concurrents, on peut affirmer que le solde infrastructure est tout même considérable. Quelle est votre stratégie pour améliorer le taux de pénétration de la télévision en Afrique ?
Nous disposons d’une quarantaine de satellites au niveau mondial. Sur l’Afrique subsaharienne, trois principaux pôles satellitaires desservent ce continent en matière de télédiffusion. L’attractivité de notre infrastructure repose en grande partie sur les contenus que nos satellites diffusent. Il peut s’agir de chaînes de télévision payantes ou gratuites, ou bien d’un mélange de contenus internationaux et locaux, ce dernier type de contenu étant particulièrement important pour les consommateurs.
Malgré le dynamisme du secteur de la télévision satellitaire, les opérateurs eux-mêmes laissent penser que le satellite sert de complément à la couverture géographique en cas de défaut d’antennes relais de la TNT, notamment dans les zones rurales. Qu’en pensez-vous ?
Satellite et TNT se complètent. Le satellite alimente les émetteurs TNT à travers le continent africain. De plus, le satellite contribue à combler le fossé entre le réseau terrestre et les « zones blanches » par une diffusion des chaînes TV aux foyers équipés pour la réception satellite. Les pays ont des stratégies différentes sur la manière dont ils veulent couvrir leur territoire. Certains pays vont jusqu’à 70 ou 80 % avec la TNT et utilisent le satellite pour couvrir les 20 % restants, alors que dans d’autres pays, ce sont 60/40 ou 50/50. La question est donc de savoir comment partager le territoire entre ces deux infrastructures ?
N’oublions pas que le satellite offre des avantages considérables par rapport à l’infrastructure terrestre dans les zones les moins densément peuplées. Les coûts de mise en place, de déploiement et de maintenance des infrastructures terrestres dans ces zones sont considérables par rapport à ceux des capacités satellitaires. Avec la connectivité par satellite, le déploiement est plus rapide et plus rentable. En utilisant le satellite, vous couvrez l’ensemble des foyers dans votre pays dès le premier jour.