Le Leapfrog digital : pour que l’Afrique soit au rendez-vous de la 4ème révolution industrielle

Des experts de la tech ont débattu à l’occasion d’une énième conférence en ligne organisée par i-conférences, au nombre de la série web Digital Africa Live, autour de la thématique : « le Leapfrog digital : l’Afrique met le cap sur la 4ème révolution. » Les cas du Mali, du Sénégal, du Cap Vert et l’implication de Huawei dans la tranformation digitale en Afrique ont été évoqués.

(CIO Mag) – Le Leapfrog digital consiste en un saut extraordinaire de l’Afrique à connaître une croissance économique fulgurante via le numérique. Une évolution technologique qui requiert d’importants changements au niveau des institutions, de la règlementation, des infrastructures et du business model à mettre en place.

Mais déjà, le continent connaît quelques avancées : 80% d’africains ont un téléphone portable ; la 3G et la 4G couvrent 80% du territoire africain, etc. Ainsi, en 2019, le Kénya est arrivé à tirer 50% de son PIB du mobile money, à en croire le Point Afrique. De ce fait, l’effectivité du Leapfrog digital en Afrique va nécessiter un investissement conséquent dans les infrastructures ICT.

« Nous avons 9 000km de fibre. Toute la région du Sud est déjà connectée à la fibre. Deux opérateurs sont détenteurs de licence globale. Le mobile money est très développé au Mali et nous avons libéralisé le code USSD pour permettre aux services à valeur ajoutée de pouvoir s’installer », cite pêle-mêle Cheick Sidi Mohamed Nimaga, Président de l’Autorité malienne de régulation des télécommunications et des postes (AMRTP).

Cependant, poursuit-il : « la problématique de l’infrastructure constitue l’obstacle premier. Des efforts sont en train d’être faits. Il y a toujours un gap parce que les zones rurales ou éloignées qui ne sont pas densifiées ont toujours des problèmes de connexion en ce qui concerne la 2D et la 3D. »

« Développement d’une industrie du numérique »

Au Sénégal, un plan stratégique Sénégal Numérique (SN 2016-2025) a été élaboré. Son objectif est de porter à 10% la contribution du numérique au PIB à l’horizon 2025, créer 35 mille emplois directs dans le secteur du numérique et atteindre au moins la 90ème place mondiale et le 4ème rang en Afrique par rapport à l’Indice du développement des TIC de l’Union internationale des télécommunications (UIT).

« Il est question du développement d’une industrie du numérique innovante et créatrice de valeurs et de la diffusion du numérique dans le secteur économique », renchérit Bara Mbaye, Directeur des radiocommunications à l’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (ARTP) du Sénégal.

Globalement en Afrique, les défis de connectivité restent les mêmes. Au Cap Vert, Aruna Handem, Directeur des nouvelles technologies de l’Agence gouvernementale évoque essentiellement le niveau de pauvreté et le chômage. Pour connecter l’Afrique au monde intelligent, Huawei, le géant chinois des TIC propose « que les objets soient capables de capturer des données, que ces objets soient connectés et qu’il y ait l’intelligence pour traiter les données. »

Pour Chakib Achour, Directeur du Marketing Business Strategy Huawei Technologies, arriver à ce stade de développement technologique nécessite le développement des infrastructures ICT basées sur 6 piliers dont essentiellement : le big data, l’IOT, l’IA, le data center et la 5G.

« La particularité africaine en termes de connectivité, c’est le mobile qui prend de l’ampleur sur le continent. Ce qui a permis à plusieurs pays de faire un saut technologique très important. Le mobile money existe depuis longtemps en Afrique. Huawei a aidé à apporter la technologie à toutes les couches de la population africaine », soutient-il en prêchant pour le développement d’une politique nationale du haut débit à l’échelle nationale dans chaque Etat africain.

Pour un Leapfrog réussi

Si les pays africains souhaitent s’arrimer au niveau de développement technologique à l’échelle mondiale, chaque Etat a ses préoccupations. C’est le cas avec le Cap Vert où « il faut investir dans les infrastructures et avoir des politiques d’intégration régionale, continentale et pourquoi pas globale. Sans le renforcement de capacités, on aura du mal à combler ce gap. Nous voulons importer la connaissance. Notre stratégie est basée sur trois axes : la connectivité des câbles sous-marins, le renforcement des capacités et la passation des services. »

Au-delà du développement des infrastructures, le Mali plaide pour l’adaptation des outils technologiques aux réels besoins de l’Afrique. Il souhaite également que l’Afrique s’approprie les services afin de rester souverain dans cette démarche de leapfrogging digital. Mais pour Bara Mbaye, il existe des obstacles à la 5G à savoir : « le prix des fréquences et le calendrier de leur mise à disposition. Une étude met en évidence la corrélation entre la vitesse de déploiement de la couverture et le prix des autorisations. Une attribution rapide de la 5G n’est ni gage de déploiement rapide de réseaux, ni gage de développement rapide de cette technologie au sein du marché. Le moteur, c’est l’investissement de l’Afrique dans les infrastructures. »

En effet, la 5G est aujourd’hui une réalité. 356 opérateurs répartis dans 119 pays ont déjà investi dans la technologie, alors que 62 ont déjà lancé des services 5G. Même si le réseau 5G comporte des avantages tels que le débit, le temps de latence et la connectivité de masse, elle ne vient pas remplacer la 4G.

On évalue à plus de 23 mille milliards de dollars, le revenu qui découlera de l’économie digitale à l’horizon 2025. Ainsi, « l’industrie 4.0 est un concept qu’il faut adapter au contexte africain et qui a besoin d’utiliser la 5G, le cloud, l’IA et l’internet des objets. C’est la combinaison de ces technologies qui permettra de mettre en place un concept d’industrie 4.0 », assure Chakib Achour.

Michaël Tchokpodo

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