CEO d’Evolving Consulting France & Cameroun, Reine Essobmadje participe au jury de la 1re édition de l’Africa Digital Manager Award « ADMA 2021 » en tant que première Vice-présidente du Groupement interpatronal du Cameroun (GICAM). Avec ses collègues africains, elle aura la responsabilité d’évaluer les différents projets pitchés lors de la finale du concours en mai. Dans cette interview, Reine Essobmadje évoque les opportunités que représente ce concours pour les managers.
Propos recueillis par Michaël Tchokpodo
CIO Mag : L’Africa Digital Management Award (ADMA) est un challenge visant à mettre en lumière les talents et projets en matière de stratégie digitale en Afrique. Qu’est-ce que cela représente pour vous ?
Reine Essobmadje : C’est un immense privilège et un honneur de faire partie du jury de l’ADMA. Il est composé de personnes influentes dans le domaine du numérique et de la transformation digitale en Afrique. Par cette contribution, nous apportons notre pierre à l’édifice de la transformation digitale du continent africain. Ces dernières années, les disruptions technologiques, les révolutions industrielles et la pandémie de la Covid-19 ont radicalement transformé la façon dont nous travaillons, collaborons, échangeons, communiquons avec nos clients et nos partenaires. Nous rentrons dans une nouvelle ère qui se décline en phygital (physique et digital).
Nous sommes dans un monde dit « VUCA » : Volatile, Incertain, Complexe et Ambigu. Et dans ce monde, chaque manager doit utiliser le digital comme un levier de productivité. Ce concours met en lumière ceux qui transforment les différents challenges du quotidien dans leurs activités et opérations en opportunités, tout en s’appuyant sur la transformation digitale.
Quel regard portez-vous sur l’évolution des talents et des compétences africains ?
Il y a une Afrique à plusieurs vitesses. Il y a l’Afrique de ceux qui ont eu l’opportunité d’aller étudier dans les plus prestigieuses universités internationales et revenir contribuer au développement de l’Afrique. Il y a l’Afrique de ceux qui ont pu voyager dans des pays africains pour aller se former, confronter leurs expériences et savoirs et revenir contribuer au développement de leurs pays.
Il y a l’Afrique de ceux qui sont restés dans leurs pays. Parmi ceux-là, on a ceux qui sont dans les zones urbaines et qui, grâce à l’internet et à la démocratisation de l’e-learning, bénéficient des enseignements dispensés dans les plus prestigieux établissements en complément de la formation reçue localement. Et ceux qui sont en zones rurales, n’ayant peut-être pas accès à cette formation de qualité et ayant souvent des problèmes d’accès à l’énergie. Mais la particularité de toutes ces « Afrique », c’est qu’on est au final beaucoup plus dans l’expérimentation. Il y a la théorie et la pratique. Et dans la pratique, il faut pouvoir se débrouiller avec les moyens de bord.
« L’éducation est l’arme la plus puissante que l’on peut utiliser pour changer le monde », Nelson disait Mandela.
En Afrique, nos talents évoluent. Cette évolution des talents est basée sur l’expérimentation ; soit la capacité à construire en observant et en utilisant les matériaux et ressources disponibles localement. C’est notre facteur X. C’est ce qui fait la différence. Dans la gestion des talents au quotidien, l’innovation et l’expérimentation sont dans l’ADN des africains. C’est notre capacité à innover et transformer notre environnement immédiat.
Selon vous, qu’est-ce que ce concours pourrait apporter de plus aux managers sélectionnés ?
Une des choses manquantes dans les différents projets de transformation digitale, c’est le retour d’expériences pour éviter de reproduire les mêmes erreurs. Ensuite, viennent :
- le financement,
- et l’appui institutionnel ou managérial.
Par ce prix, on peut donner de la visibilité à ces managers, et de la crédibilité au sein de leurs institutions. On peut accentuer la prise de conscience dans les secteurs public et privé, car la transformation digitale est clairement une opportunité pour dématérialiser les procédures et rendre un service beaucoup plus accessible aux citoyens, aux entreprises ou aux administrations.
La mise en avant des projets sert aussi à attirer à la fois les partenaires techniques et financiers qui pourront accompagner les lauréats pour leur permettre de développer leurs projets sur une plus grande échelle sur le continent.