Une révolution est en cours et très peu en parle. La fintech fait couler beaucoup d’encre mais la structuration d’un artisanat adapté aux enjeux numériques est une tendance qui s’inscrit dans le temps. Mon Artisan, fondé par Kevin Sesse et son équipe est une entreprise qui incarne au mieux cette nouvelle ambition.
(Cio Mga) – Le secteur informel en Afrique se montre performant. Selon la Banque Mondiale, il représenterait près de 60% des richesses nationales officielles. Conscient de cet essor, la plate-forme Mon Artisan contribue grandement à rendre viable le secteur de l’artisanat sur le continent pour que les acteurs économiques travaillant dans ce secteur soient plus performants.
Au départ, Kevin Sesse, issu d’une famille modeste, connaîtra l’itinéraire des initiés du secteur informel, fait d’imagination et de débrouillardise. Plus que quiconque, il connaissait les contraintes, la diversité, les potentialités de ce secteur pourvoyeur d’emplois.
Quelques années plus tard, avec le soutien de deux amis, il a créé Mon Artisan. La société ambitionne de réinventer le secteur informel en le rendant plus prospère grâce au digital. Auparavant, pour trouver un plombier, un électricien il fallait passer par le bouche-à-oreille ou sur des petits panneaux sur les arbres. Mon Artisan, grâce à la digitalisation, certifie les compétences de ces travailleurs et donne une visibilité aux travaux réalisés par ces artisans.
Son étude de marché identifie les métiers dynamiques du secteur « Il nous fallait rassembler les clients de la classe moyenne et d’excellents prestataires pour des travaux de dépannages à domicile ou rénovation », indique-t-il. La plate-forme de mise en relation entre artisans et clients prend forme en 2017. « Il nous a fallu entre six et huit mois pour tester notre solution et éprouver notre business modèle », nous explique Kévin Sesse.
Une plate-forme à la notoriété grimpante
Actuellement, ce sont une vingtaine de métiers qui sont recensés sur la plate-forme. Mais avant de l’intégrer, une méthodologie est mise en place. « Nous vérifions les références-clients, les compétences et le statut juridique des postulants », nous explique-t-on au sein de la direction. C’est cette rigueur qui fait le succès de Mon Artisan. «Nous avons 500 artisans recensés qui ont réalisé plus de 6 000 prestations auprès de 4 000 client s», indique-t-on au sein de l’entreprise. Selon la direction, cela représenterait 300 millions de FCFA par an en termes de flux de transactions. Si l’objectif financier est indéniable, c’est surtout en termes d’impact social qu’il faut évaluer la valeur de l’entreprise. « L’artisanat est un secteur porteur car il permet de valoriser des travailleurs peu qualifiés mais doués grâce à leur capacité manuelle. En Afrique, particulièrement chez les francophones, on a trop mis en avant les diplômes et non les autres types de compétences», explique Kevin. Avec son entreprise, il espère faire évoluer les regards sur ces travailleurs. « Nous ne pouvons pas former que des intellectuels. Il nous faut aussi des travailleurs manuels », conclu-t-il. Une vision importante quand on sait que près de 70% des travailleurs sont dans l’informel sur un continent où 70% de la population a moins de 35 ans.
L’artisanat: un secteur impactant
En Côte d’Ivoire, comme dans toute la sous-région, l’artisanat est un élément moteur des économies. Selon Sidiki Konaté, ministre ivoirien de l’artisanat, ce secteur représenterait près de 15% du PIB ivoirien. « 40% de la population active ivoirienne est engagée dans le secteur de l’artisanat. Cela représente cinq millions de personnes réparties sur 8 branches d’activités et 40 corps de métiers », déclarait le ministre lors de la précédente édition du marché ivoirien de l’artisanat. Et avec le numérique, l’artisanat pourrait trouver un nouveau moteur pour lui permettre de révéler encore davantage de talents en Côte d’Ivoire comme dans tout le reste du continent africain.
Rudy Casbi