Pour Ali Kahlane, Président de Satlinker et vice-Président de CARE, la transformation numérique doit s’accroître en Algérie

Depuis près de trente ans, Ali Kahlane opère, en Algérie, dans le domaine des TIC. On lui doit de nombreuses expérimentations technologiques. Zoom sur ce pionnier du numérique.

Par Véronique Narame

Sur l’échiquier du numérique algérien, Ali Kahlane est une des pièces maîtresses. Positionné, dès le début des années 1990, dans le développement de logiciels et intégrations de solutions informatiques, il se lance à l’assaut d’Internet en 1999 et impose Satlinker comme le premier fournisseur de service VSAT (Very Small Aperture Terminal). « On est entré de plain-pied dans l’aventure Internet avec la première connexion Internet en émission-réception par satellite », explique-t-il. Cette technologie va permettre d’interconnecter les centrales de production d’électricité de l’Algérie. La Sonelgaz en sera bénéficiaire. « Les logiciels de gestion de production d’électricité étaient tous interconnectés au moyen d’un VPN (Virtual Private Network) propre et fermé à Sonelgaz». Satlinker implémentera des systèmes de réseaux privés virtuels dans bien d’autres entreprises implantées en Algérie, dont Coca Cola. Et contribuera, in fine, à la démocratisation de l’Internet. « Le service VSAT a permis aux cybercafés, dans tout le pays, de bénéficier d’une très bonne connexion Internet à bas coût ».

Lorsqu’Algérie Télécoms a pris le relais, en couvrant l’Algérie avec l’ADSL et l’installation de la fibre optique, Satlinker a opéré  dans les zones blanches, le désert, en l’occurrence. Et a fourni la technologie WIMAX, en lien avec le système VSAT, notamment pour assurer des services de redondance aux clients dont la connexion continue à Internet est vitale.

Améliorer le climat des affaires

Ali Kahlane est un informaticien de la première heure. Avant de fonder Satlinker, dont il est aujourd’hui le président, il a enseigné à l’Ecole militaire polytechnique (EMP), anciennement École nationale d’ingénieurs et de techniciens d’Algérie (ENITA). Et a effectué ses études en informatique en France et en Angleterre, où il a obtenu un diplôme de doctorat d’Etat en 1982.

Après avoir quitté l’EMP, il s’implique, en 1991, en parallèle de son investissement professionnel, dans le mouvement associatif. Il est président de l’Association des Opérateurs des Télécoms Alternatifs (AOTA), laquelle regroupe les Fournisseurs d’accès et de services Internet algériens. Et a rejoint le réseau North Africa Partnership for Economic Opportunities (NAPEO), pour promouvoir l’entrepreneuriat des jeunes. « Nous avons organisé quelques éditions de la Global Entrepreneurship Week (GEW), une semaine dédiée à l’entrepreneuriat en Algérie, qui a connu un grand succès. »

Ali Kahlane est également vice-président du Think Tank CARE, Cercle d’Action et de Réflexion autour de l’Entreprise, dont le président est Slim Othmani, PDG de NCA Rouiba. CARE bénéficie du soutien de l’Union européenne pour organiser ses célèbres “matinales de CARE”, des rencontres débats. Le Think Tank effectue aussi des missions de reporting. « Notre objectif est d’améliorer le climat des affaires en Algérie. A notre actif, la production d’un Code de Gouvernance des entreprises, auquel a participé le Ministère algérien de l’Industrie et des Mines et le Forum des chefs d’entreprises (FCE).  Cela a conduit à la création de l’Institut de gouvernance Hawkama, qui prend à présent son indépendance  ». CARE a également hébergé un programme qui soutient et récompense les projets entrepreneuriaux de jeunes en Algérie : Injaz El Djazaïr, lequel fait partie du Worldwide Junior Achievement. Soutien au numérique et aux startups

Cette vision transversale des TIC permet à Ali Kahlane de produire une analyse exhaustive sur ce secteur d’activité en Algérie. « S’agissant de la maturité numérique, l’Algérie a progressé de trois places, entre 2015 et 2017, occupant le 117è rang au classement du Networked Readiness Index. Au plan de la compétitivité, on enregistre également une avancée en 2018. L’Algérie est en 86è position sur plus de 130 pays et gagne ainsi une place par rapport à l’année précédente. Enfin, le classement 2017 portant sur l’indice de développement des Technologies de l’information et de la communication (ICT Development Index), utilisé par le ministère algérien de la Poste, des télécommunications comme principal repère, des technologies et du numérique, classe l’Algérie à la 102è place (sur 176 pays), soit un progrès d’une place. »

Pour soutenir cette dynamique et accroître le développement du numérique en Algérie, Ali Kahlane a une vision : « faire du numérique une priorité nationale pour la souveraineté et le développement économique et social du pays ».

Son ambition ? « Que les pouvoirs publics contribuent à démultiplier le nombre de startups et favorisent l’émergence des champions nationaux ; qu’ils soutiennent les clusters nationaux, organisent et renforcent les filières. Et enfin, qu’ils permettent et encouragent l’innovation et l’offshoring ».

Ali Kahlane encourage par ailleurs les jeunes à « investir, tout de suite, au moins les sept domaines d’avenir suivants : la connectivité ; les Data centers ; le Cloud ; le Big data ; le Stockage des données ; l’Intelligence artificielle et la BlockChain ».

Enfin, il est persuadé que cela est possible et « à la portée de l’Algérie », car, ajoute-t’il, « en partant ensemble, avec de la bienveillance et de la confiance envers notre jeunesse, nous devrions alors être de nouveau au sommet, comme l’avait été l’Algérie dans le domaine informatique, en Afrique et dans le Moyen Orient, des années 1970 jusqu’au milieu des années 1980 ».

Paru dans CIO Mag N°54, Septembre/Octobre 2018

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