Mohamed Saad : “Le Pacte Maroc Digital est parfaitement aligné sur la Stratégie Digitale du Royaume”

 (CIO MAG) – Dans la lignée de la stratégie digitale du Maroc, les acteurs de l’écosystème ont récemment présenté le Pacte Maroc Digital. Il a vocation à accélérer le développement du numérique dans le Royaume et à ériger, à court terme, le pays en modèle dans le domaine numérique. Parmi les initiateurs, l’Association des utilisateurs des systèmes d’information au Maroc (AUSIM). Son président, Mohamed Saad, nous explique le contenu et les enjeux de ce pacte. Interview.

CIO MAG : L’objectif du Pacte Maroc Digital est de mettre en place une stratégie numérique efficace pour que le pays devienne un hub digital régional et continental. Quel a été l’apport de l’AUSIM dans l’élaboration de cette feuille de route ?

Mohamed Saad : L’AUSIM, en tant que Think Tank autour du Digital et de l’IT, a toujours milité pour faire de ces leviers un facteur clé de succès, de croissance, et de développement de notre tissu économique. Sa Majesté a rappelé que : « l’utilisation des nouvelles technologies contribue à faciliter l’accès, dans les plus brefs délais, du citoyen aux prestations, sans qu’il soit nécessaire de se déplacer souvent à l’Administration et de s’y frotter, car c’est là la cause principale de l’extension du phénomène de corruption et du trafic d’influence ». Sa Majesté a aussi souligné que l’administration électronique doit être généralisée selon une approche intégrée. Les avancées dans différents secteurs économiques doivent s’accompagner d’une politique de haut niveau en matière de Technologie de l’Information et de Digital, d’où la création de l’Agence du Digital, qui portera forcément une stratégie et une Roadmap innovante.

Nous y contribuons à travers notre Stratégie DISRUPT :

  1. Dynamiser l’utilisation du digital à travers les actions que l’AUSIM entreprend dans l’écosystème IT.
  2. Identifier et accompagner les PME dans l’adoption du digital comme levier de développement.
  3. Sensibiliser la société sur l’utilisation du digital dans un cadre éthique, responsable et bien gouverné.
  4. Renforcer le retour d’expérience entre membres de l’AUSIM.
  5. Updater les universités par les retours d’expérience AUSIM afin de renforcer l’attractivité des métiers de l’IT et du digital.
  6. Participer aux travaux relatifs à la normalisation et à la régulation du digital, conduits par les instances gouvernementales (ADD, MIICEN, MRAFP…).
  7. Transformer les innovations des start-up et universités en Proof Of Concept.

CIO MAG : Y a-t-il une corrélation entre le Pacte Digital et la Stratégie Maroc Digital 2020 ?

M.S : Question pertinente ; la première remarque de Monsieur le Ministre Hafid EL ALAMY, ministre de l’Industrie, du Commerce, de l’Économie Verte et Numérique, quand nous l’avons rencontré, était que le PMD (Pacte Maroc Digital) est parfaitement aligné sur la Stratégie Digitale, et qu’il attendait un tel travail de fond, détaillé et pertinent. La COVID-19 a montré que le digital est un moyen qui a permis à un certain nombre de secteurs d’activité de continuer à vivre, et même de changer de business model. Nous connaissons tous la motivation et l’efficacité du ministre, qui nous a interpellés pour mettre en place un plan d’actions pour 2023 au plus tard (au lieu de 2025), un échéancier de mise en place des projets et, surtout, un planning de mise en place de Quick Wins à l’horizon 31/12/2020 ! Je dis bien fin 2020, vous comprenez donc parfaitement la pression que nous sentons pour aller de l’avant. Monsieur le ministre a donné ses instructions pour la mise en place d’une gouvernance avec l’Agence du Développement du Digital, qui joue un rôle moteur dans la réalisation de la Road Map.
CIO MAG : Quelles sont les principales recommandations que l’AUSIM a formulées ?

M.S : L’AUSIM a participé à l’élaboration du PMD, au même titre que les trois autres partenaires, à savoir l’APEBI, MNC et MSEC. Le PMD s’articule autour :

  • d’une Ambition :

Faire de notre pays une « Digital Nation » et le positionner comme un Centre d’Excellence Régional, un modèle à suivre.

  • de 5 Valeurs :

  • Et de 8 Axes :

CIO MAG : Comment mobiliser les acteurs du privé autour de ce pacte ?

M.S : Il faut savoir que toute la communauté est concernée par le PMD, et les quatre signataires du Pacte, tout comme l’ADD et les partenaires publics, sont impliqués et répondent favorablement à cette mobilisation. La gouvernance de la réalisation du plan d’actions est mise en place de telle sorte que chaque partie prenante est consciente de son rôle et ses responsabilités pour réussir ce challenge. Un reporting avec des indicateurs de performance est instauré et un PMO désigné pour suivre le respect des actions dans le temps, les budgets, le périmètre et la qualité requise.

CIO MAG : Pourriez-vous nous citer trois mesures concrètes/trois projets que contient ce pacte et qui, selon vous, sont les plus urgents à mettre en œuvre ?

Mohamed Saad

M.S : Comme mentionné plus haut, certains quick wins peuvent être mis en place très rapidement, avec une valeur ajoutée et un impact importants. Citons-en quelques-uns :

  • Soutenir le digital learning et le reconnaître en tant qu’outil et moyen de formation.
  • Proposer une démarche innovante de la commande publique afin d’encourager la population des startups à émerger et se développer.
  • Créer un indice de maturité digitale.

Ces actions ont un impact indéniable sur le secteur de l’éducation et de la formation, et on sait bien aujourd’hui que cette problématique est critique dans le monde entier, et que le développement des MOOC depuis une dizaine d’années et grâce à l’inclusion digitale permet de réduire la fracture sociale.

CIO MAG : Quelles sont vos attentes vis-à-vis des autorités de l’Etat ?

M.S : L’Etat a mis en place depuis 4 ans l’ADD, qui est le bras armé pour l’élaboration de la stratégie du digital et le plan d’actions pour sa réalisation.

La mise en œuvre du PMD a besoin de la mobilisation de l’ADD et nous avons été témoins à maintes reprises de la motivation et de l’enthousiasme de cette institution à réaliser les orientations stratégiques qui lui sont assignées. Certaines actions nécessitent aussi la mobilisation du Ministère pour intervenir auprès d’autres institutions publiques et semi-publiques et, encore une fois, Monsieur le ministre s’est montré très ouvert, prêt à nous soutenir et se faire l’avocat de la cause du digital dans notre pays.
CIO MAG : Le Pacte Maroc Digital vise à faire du secteur numérique un vivier d’emplois. Avez-vous des chiffres sur le potentiel de création d’emplois qu’il représente ?

M.S : Nous avons évalué cela bien évidement, tout comme la part du PIB que drainera ce secteur et également l’impact sur les citoyens du développement des projets eGov, mais à date d’aujourd’hui, cela fait encore l’objet d’analyses et de discussions avec les partenaires privés, publics et semi-publics.

CIO MAG : Comment favoriser un écosystème favorable à l’innovation et aux Start-up/PME pour qu’elles soient compétitives à l’international et attirent des financements ? Quelles sont les priorités dans ce domaine ?

M.S : Cette population revêt un grand intérêt dans notre stratégie, quand on sait que la PME représente 93% du tissu économique (enquête nationale auprès des entreprises, 2019, HCP). Parmi les mesures que nous avons planifiées pour développer la digitalisation des PME, on peut citer à titre d’exemple :

  • La mise en place d’un « Maroc PME Digital » qui accompagnera financièrement et de manière opérationnelle, à travers des dispositifs spécifiques, les PME et TPE qui s’engagent sur le chemin de la transformation digitale.
  • La CCG devrait garantir les projets de financement des investissements en transformation digitale des entreprises qui en ont besoin.

En ce qui concerne la start-up, le meilleur signal donné est que MSEC (Fédération de l’Ecosystème Start-up au Maroc) est signataire du pacte et a contribué activement aux travaux d’élaboration de ce projet. De plus, nous avons conçu le PMD autour de 8 grands axes dont l’un est : l’accélération de l’émergence d’un écosystème start-up fort.

Les mesures fortes proposées pour cet axe sont :

  • « Start-Up Act »
  • Fonds d’Investissement
  • 20% de la commande publique réservée aux startups.

La crise de la COVID-19 a aussi révélé au grand jour la capacité de mobilisation de notre pays ainsi que son vivier d’innovation. Plusieurs initiatives ont été mises en œuvre en quelques jours, telles que Digital Factory (ADD), HackCovid (APEBI, AUSIM…), SolidariTech (CGEM), AUSIM Webinar Series,… pour n’en citer que quelques-unes. Elles ont permis de démontrer que les entrepreneurs et les innovateurs marocains ne manquaient pas d’ingéniosité. Au contraire, ils en avaient même beaucoup à revendre.

 

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