Plus qu’un service gratuit ouvert à toutes les institutions académiques qui souhaiteraient opérer une transition vers les cours en ligne (ou e-learning), c’est une action de responsabilité sociétale que réalise la startup ivoirienne Etudesk face à l’urgence sanitaire du COVID-19.
(CIO Mag) – Alors que des milliers d’élèves et étudiants se retrouvent à la maison en raison de la fermeture des établissements scolaires et universitaires, des entrepreneurs ivoiriens réunis au sein de la startup Etudesk se mobilisent pour renverser la fatalité du Covid-19.
Depuis le début de la crise, l’épidémie oblige les écoles à revoir leurs pratiques. En l’absence de visibilité précise sur la reprise normale des cours, certains établissements essaient d’être proactifs en assurant la continuité pédagogique avec le e-learning. De toute évidence, cette transition n’est pas aisée. En Afrique subsaharienne, les écoles n’ont pas toujours l’expertise de gestion de programmes de formation en ligne, ni le budget pour la mise en place d’un tel dispositif. Selon l’Unicef, 1,250 milliard d’élèves et étudiants ont arrêté d’apprendre.
Transition vers les cours en ligne
Spécialisée dans la conception de technologies et de modules de formation destinés à l’éducation, « Etudesk a décidé de mettre sa plateforme de e-learning gratuitement à la disposition des écoles, universités et grandes écoles en Afrique, et son expertise en ingénierie pédagogique afin de les aider à opérer cette transition en moins d’une semaine », déclare à CIO Mag, Lamine Barro, le fondateur & CEO de cette startup issue de la promotion 2018 de la Fondation Jeunesse Numérique.
A ce jour, plus de 14 établissements bénéficient de cet accompagnement en Côte d’Ivoire. Il s’agit entre autres de l’Ecole primaire La Coccinelle de Bingerville, l’Institution Raggi Anne-Marie de Grand-Bassam (IRMA) et Sup’Elite Business School. On peut en citer bien d’autres. Comme l’Institut de management, de gestion et d’hôtellerie (IMGH), l’École hôtelière de Bassam (EHB) et l’École supérieure de profession immobilière (ESPI). De même, au Sénégal, c’est l’Institut académique des Bébés qui est pris en charge par Etudesk.
e-Learning quasi inexistant dans les universités
Sur les bords de la lagune Ebrié, la continuité des cours est effective depuis le 6 avril pour tous les élèves en classes d’examen (CM2, 3ème et Terminale). Les programmes sont suivis gratuitement en ligne, par SMS et à la télévision. Des voix se sont élevées pour féliciter ce dispositif qui permet aux apprenants de rester chez eux à cause de la maladie à coronavirus, tout en gardant leurs cahiers ouverts. Du côté de l’enseignement supérieur, les choses semblent plus compliquées.
« En dehors de l’Université virtuelle de Côte d’Ivoire (UVCI) qui continue normalement son programme, nous ne voyons toujours pas d’initiatives pour la formation des étudiants des universités publiques », s’inquiète Lamine Barro. Pour lui, il faut anticiper une reprise accélérée des cours à la fin de cette crise, en s’assurant que les pays africains disposent des ressources prêtes à amorcer la phase post-coronavirus.
Contexte favorable à la communauté Tech mais…
Dans tous les cas, l’environnement devient favorable à la communauté Tech qui innove sur tous les continents pour soutenir les pouvoirs publics dans la lutte contre la pandémie. Toutes choses qui pourraient changer le regard des décideurs, en plaçant désormais le numérique au top des agendas, notamment en termes de financement.
« Globalement, les gouvernements feront donc plus d’investissements dans les projets innovants, dans les startups et l’écosystème du numérique », s’exclame le CEO d’Etudesk créée en 2016. Le lauréat du Prix d’excellence 2019 reste tout de même sceptique quant au traitement des startups du continent africain après cette crise. Et pour cause ?
« Pour les gouvernements africains, la mondialisation rend plus simple d’acheter des technologies aux quatre coins du globe plutôt que d’investir dans des initiatives locales. On voit par exemple des dizaines de milliers de licences de Microsoft achetées pour la mise en place du télétravail. Depuis janvier 2020, le titre de l’entreprise Zoom (application de visioconférence) a bondi de plus de 100 % et a atteint près de 40 milliards de dollars de capitalisation boursière. Idem pour le marché du e-learning, 800 millions de dollars américains de dépenses ont été effectuées par l’Afrique en 2018 et plus de 90 % des solutions achetées proviennent hors du continent », regrette Lamine Barro.
Face à l’urgence de la pandémie de Covid-19, ce diplômé de licence en sciences biologiques de l’université Péléforo Gon Coulibaly de Côte d’Ivoire conseille aux startups numériques africaines de se montrer « plus que jamais résilientes et d’être force de proposition pour leurs gouvernements ».
Anselme AKEKO, Abidjan