En Egypte, le secteur des télécoms est performant comme Mohamed Salah

A l’occasion de la Coupe du Monde de Football 2018 qui se déroule en Russie, la Rédaction de CIO Mag vous invite à découvrir l’Afrique qui gagne, à travers une incursion dans l’écosystème numérique des cinq (5) nations engagées dans la compétition : l’Egypte, le Nigéria, la Tunisie, le Sénégal et le Maroc.

(CIO Mag) – Déjà championne d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient en matière de formation, d’édition et de diffusion, l’Egypte veut encore gagner le Mondial des TIC. Au premier trimestre 2018, le taux de croissance combiné du secteur des télécoms et TIC était de 14% ; soit 9,5% pour les télécoms et 4,5% pour les technologies de l’information et de la communication. Forts d’une économie numérique aussi performante comme Mohamed Salah, les Pharaons du Nil visent loin. Par exemple, une augmentation de la contribution du secteur des TIC au PIB de 3,5% à 8% à l’horizon 2025.

Gouvernance

C’est sous la houlette de Yasser ElKady, un entraineur rompu aux arcanes des TIC, que la nouvelle stratégie d’attaque de l’Egypte sera mise en œuvre. Ministre des Communications et des Technologies de l’information, Yasser ElKady a fait de la vulgarisation du numérique son terrain de jeu. Il est accrédité d’une expérience de plus de 25 ans et bénéficie de la confiance du président de la République Abdel Fattah al-Sissi pour faire de l’Egypte un Etat où le numérique est catalyseur de développement.

Accroître les exportations technologiques de 3,25 milliards à 20 milliards de dollars ; héberger 5 grands centres de données mondiaux ; construire 10 parcs technologiques. Voilà quelques objectifs visés par cette stratégie numérique qui sera exécutée courant 2020, afin de faire du secteur un véritable moteur de création de richesse. En première ligne, la création de près de 4,5 millions d’emplois directs et indirects.

Hub technologique

Pour ne pas dévier de sa trajectoire, la stratégie numérique de l’Egypte devrait pouvoir compter sur ses jeunes talents. La seule ville du Caire compte une quinzaine de hubs technologiques. A l’image des centres de formation de football, elles servent de rampe au lancement de startups telles que Jobzella (premier site de recherche d’emploi au Moyen Orient), Yaoota (comparateur de sites de e-commerce) et Bedoya (créateur d’un robot connecté pour la pisciculture). On peut en citer bien d’autres comme la pépite Bassita qui œuvre à l’amélioration des vies grâce à de simples clics.

En Egypte, plusieurs jeunes pousses se sont lancées sur le terrain numérique après la révolution de 2011, mais la course à l’innovation bute contre des restrictions de l’armée sur l’importation de certains constituants électroniques.

Mobile, fixe : les chiffres clés

Au 3 décembre 2017, la téléphonie mobile comptait plus de 110 millions de connexions partagées entre des prétendants sérieux aux titres de meilleure couverture réseau et de meilleure qualité de service internet. Il s’agit d’Orange Egypte : 33 millions d’abonnés ; Etisalat Misr : 33 millions d’abonnés ; et Vodafone Egypte : 39,7% d’abonnés, détenu à 45% par l’opérateur historique, Telecom Egypt (TE).

En 2017, TE a fait entrer dans le match déjà serré, un nouvel attaquant qui n’est autre que sa propre filiale mobile, WE. De quoi susciter inquiétude et critique chez les autres compétiteurs qui réclament une concurrence plus saine. Niant tout favoritisme, Ahmed El Beheiry, PDG de Telecom Egypt, a déclaré à l’AFP qu’il n’y a pas de petits « joueurs » dans cette compétition, et « pas de terrain plus difficile » que celui-là. Tout le contraire de la téléphonie fixe où la compétition se joue presque en solo avec TE qui subit cependant une forte concurrence depuis l’avènement du mobile en 1998. Aujourd’hui, la téléphonie fixe compte moins de 10 millions d’abonnements.

Le ministre égyptien Yasser ElKady à l’inauguration de l’usine de câbles à fibre optique à Badr City, le 6 mars 2018.

Internet haut débit

Sur les bords du Nil, internet est adulé par la population comme l’est le football. Tenez ! Le taux de pénétration est passé de 1% en 2000 à 5% en 2004, 24% en 2009 et 54,6% en 2014. Et depuis, il ne cesse de croître. Sur le segment de l’Internet haut débit commercialisé à partir de l’an 2000 en tant qu’ADSL, il existe deux catégories de championnat. La première division composée de « grossistes » disposant de l’infrastructure ADSL, dont Egynet, LINKdotNet et TE Data, qui vendent des services internet à plus de 200 fournisseurs, la deuxième division.

Outre le principal centre de commutation de Telecom Egypt (la Ramses Exchange), le pays compte deux points d’échange Internet : Internet régional du Caire (CR-IX) et Internet du Moyen-Orient (MEIX). A l’échelle internationale, l’Egypte est reliée à trois câbles sous-marins : FLAG, SEA-ME-WE 3 et SEA-ME-WE 4.

Défenseur de la concurrence

Malgré ses bons résultats dans le secteur des télécoms et TIC, l’Egypte peine à gagner des points dans le classement mondial de la liberté d’expression. Et pour cause ? Les associations des droits de l’Homme tirent à boulet rouge contre le régime qu’ils accusent d’avoir fermé plus de 60 sites internet pour des « fautes » graves comme l’insulte au chef de l’Etat, l’incitation à la violence ou la diffusion de fausses nouvelles.

Défenseur de la concurrence entre les entreprises du secteur, l’Autorité nationale de régulation des Télécommunications (NTRA), que dirige Mustafa Abdul Wahid, est ainsi amenée à prendre les devants pour assurer la disponibilité et l’accès aux services de communication électronique, quand bien même, les pouvoirs publics disposent d’une loi d’urgence qui permet, depuis les attaques terroristes dans deux églises en 2016, de surveiller les communications personnelles et de fermer les médias.

Dans ce contexte, le ticket égyptien ne part pas favori dans les classements internationaux. Mais au pays de Mohamed Salah on espère que l’équipe nationale égyptienne des TIC, emmenée par Yasser ElKady, pourra redorer son blason à l’extérieur. Sachant qu’internet a quand même permis aux Egyptiens de participer à des discussions communautaires et impulser via les réseaux sociaux tels que Facebook et Twitter la révolution de 2011.

Notes (sur 5) : infrastructures (4,5/5), formation (4/5), startups (3,5/5), gouvernance (3/5)

Anselme AKEKO


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Anselme AKEKO

Responsable éditorial Cio Mag Online
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Journaliste économie numérique
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