La révolution numérique est en marche en Afrique depuis plusieurs années déjà. Le numérique et les nouvelles technologies se sont invités dans le quotidien des populations africaines, stimulant ainsi l’innovation et la création d’emplois, – de facto la croissance économique -, tout en étant un puissant vecteur de développement social, renforçant ainsi l’espoir de réduire la fracture numérique sur l’ensemble du continent et les inégalités.
(Cio Mag) – Conscients des bénéfices et des opportunités qui entourent la digitalisation des économies, couplée au fort potentiel numérique du continent, de nombreux États africains organisent aujourd’hui leur stratégie digitale nationale autour de l’intégration de technologies de l’information et de la communication (TIC) de pointe. En outre, les conditions et modes de vie, bouleversés depuis la crise de la Covid-19 notamment, ont été d’incontestables leviers d’accélération pour les ambitions numériques du continent.
Compte tenu de la forte dynamique démographique, dont la population devrait doubler d’ici à 2050 (d’1 milliard d’habitants en 2019 à près de 2,4 milliards dans 30 ans), l’enjeu de la transformation numérique du continent est considérable. Comment assurer un égal accès aux technologies numériques afin que chaque habitant puisse en saisir toutes les opportunités ? Les écosystèmes du numérique en Afrique prospèrent et se structurent au bénéfice des économies nationales, apportant ainsi des solutions à une population qui est en demande croissante de nouvelles opportunités à même de répondre aux défis structurels et conjoncturels sur le continent. En effet, si cette progression se poursuit, les externalités positives du taux de pénétration d’Internet associées au développement économique ont le potentiel de contribuer pour 180 milliards de dollars au Produit Intérieur Brut (PIB) de l’Afrique d’ici 2025.
Cette progression semble se confirmer à la lumière de la croissance de la tech africaine qui enregistre « deux fois plus d’activité que [2021], et plus de trois fois le montant investi, atteignant 5,2 milliards de dollars », d’après le dernier rapport de Partech Africa sur le financement en capital-risque des start-ups africaines. L’écosystème des start-ups s’est montré particulièrement résilient face à la crise de la Covid-19 et ses conséquences sur les économies des États du monde entier. En effet, les start-ups africaines ont réalisé un plus nombre de levées de fonds records au regard de l’année précédente, avec une croissance de 44% en 2020 : « 359 levées de fonds ont ainsi été négociées avec succès par 347 start-ups en 2020, contre 250 deals recensés en 2019 », souligne Partech Africa.
Développement du secteur numérique
Cet écosystème florissant est avant tout porté par d’importants efforts réalisés ces dernières années en matière de formation et de transfert de connaissances et de compétences. La disponibilité et la qualification du capital humain sur le continent est un axe majeur des politiques publiques numériques, mais aussi des initiatives privées en Afrique, à tel point que dans certains pays, « la demande en développeurs professionnels (par exemple), a commencé à dépasser l’offre au milieu de la dernière décennie ». C’est le cas du Sénégal, où l’on recense une hausse de 7,5 points de codeurs professionnels entre 2020 et 2021, atteignant le nombre de 10 000 en 2021.
Cette croissance fulgurante est le fruit d’un plan numérique national lancé en 2016, dont la priorité fut de créer des filières de formation sur les technologies émergentes (Big Data, cloud, intelligence artificielle – IA -, Internet des Objets – IoT -). En parallèle, les initiatives de grands groupes comme Orange, Free, Atos ou encore Microsoft, installés sur le continent bourgeonnent et permettent d’accélérer cette montée en compétences des jeunes talents du numérique actuels et des nouveaux arrivants sur le marché du travail demain. Au Sénégal toujours, un an après le lancement du plan national, la Huawei ICT Academy déployée par l’équipementier chinois Huawei voit le jour au sein de l’Institut Supérieur d’Informatique (ISI)[7], bien avant l’inauguration de la Dakar Institute of Technology, une école qui enseigne les technologies d’IA.
Le développement du secteur numérique sur le continent est cependant très disparate entre les régions, voire entre les zones d’un même pays. L’écosystème des start-ups de l’Afrique anglophone demeure favori en matière de destination des investissements selon Briter Bridges, société de recherche axée sur les données des écosystèmes d’innovation et de technologie dans les marchés émergents. En effet, sur « les 8,8 milliards $ levés entre 2015 et 2021, l’écosystème start-up d’Afrique francophone n’a réussi à capter que 417,9 millions $ ». Ce constat s’explique notamment par le niveau de facilité à faire des affaires qui demeure plus faible qu’en Afrique anglophone (parmi les critères : la facilité de création d’une entreprise ; l’accès à l’électricité ; l’accès au crédit bancaire ; l’environnement fiscal). Dans l’édition 2020 de son rapport Doing Business, la Banque mondiale classe la majorité des pays d’Afrique francophone parmi les derniers.
Dans ce contexte, les opérateurs et équipementiers installés sur le continent déploient toute leur énergie pour continuer de réduire ce fossé. Orange par exemple, s’est récemment associé à Bboxx, acteur de référence dans la fourniture de services solaires off-grid pour déployer un « mini-réseau qui contribue à accélérer l’accès à une énergie propre pour les ménages de la République Démocratique du Congo (RDC), en fournissant de l’électricité à 600 foyers ». En parallèle, Orange Smart Metering, solution IoT de compteurs intelligents, permet aux clients de régler leur facture d’électricité en prépaiement à travers les solutions de mobile money du groupe. Ce type de partenariat n’est pas un cas isolé en Afrique, notamment dans les pays francophones, et tout particulièrement dans les zones rurales où l’environnement, par nature, rend les installations d’infrastructures plus compliquées et onéreuses qu’ailleurs.
Des solutions Huawei
Par conséquent, les services numériques du quotidien peuvent difficilement parvenir jusqu’aux populations habitant ces zones isolées. Afin de surmonter les différentes contraintes qui se présentent dans ces territoires reculés, comme l’état impraticable des routes ou encore l’instabilité de l’approvisionnement en électricité, des entreprises telles que Huawei Northern Africa développent des solutions adaptées afin d’y déployer une couverture réseau optimale et de qualité. Baptisée « RuralStar Pro », il s’agit d’une station de base facilement transportable, dont l’acheminement est également plus abordable. Ces stations permettent d’offrir aux populations habitant ces zones isolées, l’opportunité d’appeler et d’avoir accès aux réseaux 3G et 4G.
Ce type de solution est indispensable pour relever le challenge de la fracture numérique sur le continent. Et ainsi, faire du numérique l’un des principaux leviers du développement socio-économique des pays africains. Tout en stimulant la compétitivité, les nouvelles technologies permettent par ailleurs d’innover afin d’optimiser les services jugés essentiels, tels que l’éducation, la santé ou encore l’agriculture. En effet, les économies de nombreux États africains reposent encore pour près de la moitié sur l’agriculture et l’exportation de ces produits agricoles. À titre d’exemple, la Côte d’Ivoire représente 40% de la production mondiale de cacao et ce secteur emploie 45% de la main d’œuvre du pays. En outre, « deux Ivoiriens sur trois vivent grâce au secteur agricole tandis que moins de la moitié de la population vit en zone urbaine ».
Ainsi, le déploiement de solutions numériques à destination de secteurs traditionnels tels que l’agriculture représente un volet non négligeable des enjeux technologiques sur le continent. Par ailleurs, compte tenu de l’urbanisation croissante sur le continent, de nouveaux défis apparaissent. Ainsi, les questions de construction de villes conciliant innovation, modernisation, mobilité et développement durable constituent de plus en plus une priorité. Le Digital African Tour qui se tiendra prochainement à Casablanca aura notamment cœur à s’intéresser à ces problématiques qui façonneront dans un futur proche l’avenir de l’Afrique.
La prospérité du secteur numérique africain semble ainsi dépendre de la capacité des États à conjuguer les politiques de désenclavement des territoires et les stratégies nationales digitales en favorisant l’intégration des technologies de nouvelles générations dans le quotidien des populations. La dynamisation du secteur de la tech en Afrique est une réalité que nul ne peut nier. Les technologies contribuent déjà à la réalisation des objectifs de développement socio-économiques sur le continent. Si les défis qui restent à relever sont encore nombreux, le fort potentiel dont dispose l’Afrique ne peut que nous laisser optimistes.