Tech : les levées de fonds, une condition impérative pour réussir ?

Elles occupent les esprits de tous les acteurs de la tech. Mais le constat est sévère. Beaucoup de demandeurs mais peu d’élus. En moyenne, 2% des startups parviennent à attirer les investisseurs ou business angels. D’autres procédés, plus méconnus, sont pourtant des outils bien efficaces pour la croissance des entreprises.

Par Casbi Rudy

(Cio Mag) – Il est impossible de parler de levée de fonds quand on évoque le sujet ‘startup’. Selon le baromètre EY du capital-risque en France, les startups tricolores ont levé 5,4 milliards d’euros pour 620 jeunes pousses en 2020. Selon cette même étude, la valeur moyenne des investissements en 2020 a grimpé de 6,9 à 8,7 millions d’euros malgré une baisse du nombre de tours de table. Si nous sommes nombreux, et à juste titre, très heureux de cet engouement: il n’en demeure pas moins que les investisseurs ne dissimulent pas leur frilosité. «80% des investissements n’apportent aucune rentabilité pour les investisseurs car les startups ferment leurs portes en raison d’un défaut de trésorerie», indique-t-on au sein des fonds d’investissements français.

En conséquence, malgré la manne financière disponible, la concurrence entre les entrepreneurs se tend. Certains ont donc opté pour un autre fonctionnement: compter sur sa propre capacité d’auto-financement. Cette stratégie est également nommée le «bootstraping».

Brice Ngouo, fondateur de Kliner – une application qui permet de trouver la meilleure aide-ménagère disponible à proximité, a suivi cette tactique. «Au tout début, nous avons souhaité être accompagner par des fonds d’investissements, des business angels ou des banques», indique-t-il. Puis il poursuit: «j’ai observé une certaine frilosité. Pour masquer cela, ils s’inscrivent dans des processus de sélections de plus en plus complexes ou délirants, ce qui se traduit par une perte d’énergie pour l’entrepreneur», explique-t-il.

Ainsi, cet entrepreneur franco-camerounais a investi en fonds propres avec du love-money. Depuis sa création en 2014, plus d’un demi-million d’euros ont été progressivement investis dans Kliner. «J’ai financé une grande partie et il y a eu du love-money et le reste l’a été grâce à la croissance», indique-t-il. Ainsi, près de dix emplois ont été créés.

Il faut dire que Kliner n’est pas la seule startup à démarrer ainsi. Le fondateur de GoPro, Nick Woodman, avait commencé par vendre des ceintures de perles et de coquillages balinais depuis son camping-car financé grâce à un prêt de son père. Facebook et même Apple ont eu recours à ce procédé.

Il faut mettre le paquet sur les clients !

La levée de fonds est-elle une réelle condition sine qua non au succès ? Pas si sûr. Selon Andy Ayim, directeur de Backstage Accelerator – célèbre incubateur londonien, la plupart des startups n’ont pas besoin de financements extérieurs pour démarrer. «Lorsque nous avions lancé un programme d’accélération. Nous pensions recevoir 800 dossiers et nous avons eu que 2% de réussites», écrivait-il dans un tweet. Un avis qui semble être partagé par la Kauffmann Fondation. Selon l’institution, 0,5% des startups américaines ont levé des fonds grâce au private-équity alors que 64% des nouvelles pépites se sont financées par le love-money et les ventes réalisées par l’entreprise.

Et c’est exactement le chemin suivi par plusieurs entrepreneurs dont Brice Ngouo qui a réussi à créer de la croissance sans fonds d’investissement. Pour cela, il faut inscrire sa vision sur un temps long. Car, en plus de créer de la richesse, le volet social prédomine également. «Le temps long suppose une vision claire. Nous n’étions pas partis dans l’idée de lever des fonds sans avoir éprouver notre modèle économique», indique le fondateur de Kliner – dont la startup se nourrit de centaines de données pour proposer des prestations adaptées à la demande grâce à l’intelligence artificielle. Si Kliner a pu tenir sans levée de fonds, c’est aussi parce que le modèle économique a été plus rapidement trouvé. Sur le montant prélevé, l’entreprise soutire une commission et rétribue l’aide-ménagère après chaque commande. Jusqu’il y a peu, la startup revendiquait 17 000 téléchargements sur l’Ile de France. Et aujourd’hui, l’objectif est de s’étendre sur toute la France (Hexagone et Outre-mers).

La valeur sociale, impérative mais souvent négligée

Tous les grands chefs d’entreprises le savent: une entreprise qui ‘gagne’ enregistre des gains. Une société, qui perdure, créée de la valeur sociale en plus de la richesse financière. Pour Kliner, l’équation était simple. «C’est en améliorant les revenus des aides-ménagères qu’on facilite leur insertion sociale. C’est pourquoi, nous continuons sur cette lancée en créant la Kliner Academy», indique-t-on au sein de la startup. En accord avec plusieurs associations implantées localement sur tout le territoire français, les profils y seront sélectionnés et leur prodiguerons des formation en gestion financière avec un renforcement de l’apprentissage du Français.

«Durant la COVID-19, leur importance est cruciale pour assainir les bureaux, maisons et appartement pour éviter la propagation du virus.Il faut leur rendre le retour». Une centaine de profils seront acceptés puis intégreront la plate-forme. A ce rythme, la startup pourrait connaître une croissance encore plus importante. Car la marque sera portée exclusivement par les utilisateurs qui créeront le succès.

https://sifted.eu/articles/founders-focus-product-not-funding/

https://sifted.eu/articles/startup-bootstrapping/

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