Yves Eonnet : « Les Fintechs motivent les banques à devenir plus agiles, moins chères et plus efficaces »

Depuis 2019, le continent africain assiste à la montée en puissance de la FinTech. Les tours de table réalisées au cours du premier trimestre de cette année étaient dominées par les solutions de technologies financières qui ont arraché 50 bonnes opérations sur les 160 levées de fonds. Un progrès qui n’est en réalité un signe avant-coureur de la révolution de l’écosystème des investissements en Afrique. Mais qu’est-ce-qui explique ce succès des fintechs ? Quelle est leur valeur ajoutée dans l’inclusion financière en Afrique? Représentent-elles l’avenir de l’économie africaine ? Ces questions ont fait l’objet de notre entretien avec Yves Eonnet, cofondateur de « Skaleet », une fintech qui a pour missions d’apporter aux banques et aux établissements financiers du continent les toutes dernières technologies leur permettant de construire des services bancaires digitaux (Mobile, Cloud, temps réel…) et ainsi de développer l’inclusion financière dans les différents pays, et à moindre coût. Découvrez ici la substance de notre échange !

Cio Mag : En peu de mots, quels sont les services offerts par Skaleet aux banques en Afrique ?

Yves Eonnet : Skaleet fournit aux banques et aux établissements financiers les logiciels et les outils informatiques indispensables pour livrer des services financiers digitaux à leurs clients. Depuis toujours, les banques gèrent les comptes et les transactions sur des Core Banking System (CBS) qui leur ont permis de gérer les agences et tous les services financiers à destination de leurs clients (les entreprises et les clients aisés). Sont apparus trois nouveaux facteurs qui invitent les banques à changer de génération de CBS et à adopter un CBS digital : la nécessité de mieux servir ses clients avec des services de plus en plus personnalisés ; la disponibilité des nouvelles technologies comme proposées par Skaleet ; l’arrivée de menaces inquiétantes que sont les opérateurs télécoms et les GAFA qui rentrent de plus en plus dans la chaîne de valeur de la banque.

Quel état des lieux faites-vous de la FinTech en Afrique ? 

L’Afrique est un continent très dynamique avec à la fois beaucoup de compétence et une très grande détermination. Dans toutes les sous régions, les fintechs africaines sont créées avec souvent de très bonnes idées et beaucoup de savoir-faire mais l’infrastructure bancaire encore non digitale ne leur permet pas de s’appuyer facilement sur les banques historiques pour accélérer leur croissance. Les offres de Banque As A Service (BAAS) ne permettent pas suffisamment aux fintechs de bénéficier des licences bancaires de leurs aînées pour se développer. Les banques doivent réaliser qu’une partie importante de leur succès futur dépend de leur capacité à coopérer avec les fintechs.

Quel est l’avenir du système bancaire en Afrique avec la montée fulgurante des fintechs ? 

Il est toujours plus simple de lancer de nouveaux services sur un terrain vierge plutôt que d’avoir à arrêter et à fermer un service existant devenu obsolète pour en lancer un nouveau. L’Afrique, avec son taux moyen de bancarisation très bas, bénéficie de cette situation. L’inclusion financière donne l’opportunité aux banques africaines de devenir les leaders mondiaux en banque digitale. Je suis convaincu que la Silicon Valley de la banque n’est pas en Californie où les systèmes bancaires de l’ancienne génération sont Omni présents, mais en Afrique où la majorité de la population a un téléphone dans une poche et du cash dans l’autre, l’utilisation du mobile pour bancariser tout le monde est une évidence 

Quelle est la valeur ajoutée des fintechs dans l’inclusion financière en Afrique ?

Les fintechs jouent un rôle moteur dans l’économie car elles motivent les banques à devenir plus agiles, moins chères et plus efficaces. La grande aventure de l’inclusion financière se fera grâce aux fintechs qui vont dynamiser le secteur et permettre ainsi la mobilisation de l’épargne locale qui permettra le financement de l’économie. L’argent déposé à la banque permet d’accorder des prêts aux PME qui créeront ainsi des emplois. La dynamique des fintechs provoquera le démarrage d’un cercle vertueux dont toute l’économie bénéficiera.

Les fintechs représentent-elles l’avenir de l’économie africaine ? 

Le principal enjeu des années à venir est la prise de conscience des banques que le rôle des fintechs est essentiel pour inclure toute la population dans l’économie. La technologie est disponible, les fintechs sont au rendez-vous, reste aux banques de créer des offres BAAS (Bank as a service) afin de capitaliser sur l’innovation des fintechs tout en garantissant le respect de la régulation pour développer le métier de « banquier pour tous » que l’Afrique attend.

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Enock Bulonza

Journaliste spécialisé dans les TIC et la santé. Passionné par les technologies émergentes (IA, Programmation web et mobile et la blockchain, etc). En tant que correspondant de Cio-Mag dans la région des Grands Lacs africains, je suis chargé de couvrir les développements technologiques et de fournir des informations précises et pertinentes sur ces sujets.

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